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Twitter : @Rcoutouly

Il faut demander plus à l'impôt

et moins aux contribuables

 

Alphonse Allais

 

Outil fiscal

Les contributions incitatives sont des micro-taxes payées sur les activités polluantes. L'argent récolté permet aux plus démunies d'investir dans les transitions écologiques et énergétiques. 

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Un résumé de la pensée de l'auteur sur la crise écologique 
20 avril 2013 6 20 /04 /avril /2013 11:24

 

grenelle.jpg

Le concept de contributions incitatives a été inventé par l'auteur de ce site, lors du printemps 2007. Faisons la génèse de cette idée.

On en trouvera une première trace dans le premier blog de l'auteur, matrice de la constitution de sa réflexion, ainsi que butte témoin de cete création.

Lors du lancement du Grenelle de l'Environnement, cette idée est défendue dans une contribution, envoyée par l'auteur. Ce texte, que l'on retrouvera ci-dessous, a été utilisé par le groupe 1 "lutter contre les changements climatiques et maîtriser la demande d'énergie", on en retrouve mention dans le rapport fourni par ce groupe le 26 septembre 2006. Ce rapport est à l'origine de la mise en place du bonus-malus automobile.

 

"C’est une question majeure du Grenelle de l’environnement : quelle fiscalité verte ? Il s’agit  de la problématique la plus délicate et la plus importante. C’est un levier d’action indispensable mais très impopulaire.   Si on ne l’emploie pas, on sera taxé d’immobilisme, et si on l’emploie, de prendre des mesures impopulaires.  Comment sortir de ce dilemme? En inventant, en innovant, en imaginant d'autres modes d'actions.    La méthode des contributions incitatives, que nous proposons ici, est un outil qui peut permettre à la réflexion collective de progresser et aux hommes et femmes politiques de retrouver l’initiative.

 Sur la fiscalité environnementale

Les mesures fiscales liées à l’environnement existent depuis 1964 (loi sur l’eau) et concernent actuellement  une quarantaine de taxes et autant de mesures d’exonérations. Cette prolifération suffit à prouver l’intérêt de la démarche. Elle a pourtant bien des limites, signalons-en quelques unes :

-les  deux objectifs de la fiscalité écologique (écologique et financement de l’Etat) ne sont-ils pas contradictoires ? En particulier, si l’objectif écologique vise à réduire l’assiette de la taxe, l’objectif de financement tend, au minimum, à la maintenir.

-l’acceptabilité d’une taxe écologique entre en contradiction avec le fait que le changement de comportement espéré a un coût  souvent élevé. Ce coût s’additionne alors à celui de la taxe. Il y a donc une deuxième contradiction entre la mission redistributive dévolue à la fiscalité et  sa fonction écologique : le risque de renforcement des inégalités sociales s’accroît.

 -la troisième contradiction concerne les problèmes de compétitivité internationale. Ces taxes risquent d’entraîner des pertes de compétitivité.  L’impopularité de la fiscalité écologique ne concerne pas uniquement l’électeur, elle a un impact sur les chefs d’entreprises.

Ces trois contradictions contrarient la mise en œuvre de la fiscalité environnementale. Les mesures prises pour gérer ses contradictions entraînent une complexification qui nuit fortement à son efficacité. La méthode des contributions incitatives permet de conserver les avantages de la fiscalité écologique tout en dépassant ces contradictions.

Définition de la méthode

Nous l'appelons contribution incitative. Nous la décrivons en détail plus bas à partir d'un exemple. Tentons de la définir : il s'agit de récompenser ceux qui font l'effort d'avoir un comportement responsable par une incitation financière, financée par les contributions de ceux qui ne font pas d'efforts. 

Il s'agit de contributions et non de taxes, toujours impopulaires et souvent inefficaces, c'est à dire que l'argent récolté sera utilisé (presque) exclusivement et directement au profit des personnes, des collectivités et des entreprises qui feront des efforts environnementaux.

Il ne s'agit pas non plus d'incitations fiscales, qui au-delà de leurs mérites, contribuent à la dégradation des comptes publiques. Il s'agit de redistributions, prenant de multiples formes comme on le verra plus loin, qui s'adressent à tous, sont progressives et qui permettent à chacun, en toute liberté de prendre des décisions en connaissance de cause.

« Je suis un particulier, je choisis de continuer à employer un mode de transport ou de consommation énergétique polluant, mais je sais qu'il faudra en assumer le prix de plus en plus élevé, j'ai eu connaissance des augmentations prévues, qui bénéficieront à ceux qui feront des efforts» ou « je choisis de changer mes habitudes et je sais que je vais récolter financièrement les fruits de mes efforts écologiques ». « Je suis une entreprise, j'ai choisi d'investir et de proposer des services ou des produits durables, je prend le risque de le faire parce que la nation s'est engagée à favoriser leur usage et à aider les entreprises qui iraient dans ce sens. »

Dans cette méthode, il y aura de multiples contributions incitatives précises, délimitées dans des domaines très diverses, et toutes seront progressives. Concrètement, comment cela  fonctionne-t-il?

Description 

Le parlement vote une loi fixant le principe d'une contribution incitative dans un domaine précis. A la suite de cela, un comité de pilotage se met en place. Il regroupe consommateurs (ceux qui vont financer la contribution ou/et en bénéficier), entreprises du secteur, pouvoirs publics, scientifiques et responsables politiques. Il organise, dans la concertation, l'organisation de cette contribution.

Il est créé une fondation, structure d'économie mixte, chargée de gérer les fonds récoltés et redistribués. Une administration, un ministère, ou une collectivité territoriale, est désigné pour prévoir l'assiette de la contribution, la récolter, organiser la redistribution.

Une fois la contribution mise en place, l'argent récoltée est redistribuée l'année suivante de différentes manières:

-la majorité de ces produits financiers est redistribuée aux personnes qui ont eu un comportement responsable comportement défini de manière précis (de l'ordre de 60% des fonds) dans la population où a été prélevée la contribution.

-une part importante de cet argent sera attribuée aux entreprises qui, dans ce secteur, proposeront des services écologiquement responsables ou réaliseront des investissements (de l'ordre de 30% des fonds).

-une part mineure sera attribuée à l'administration en charge de la récolte et de la distribution (de l'ordre de 5%)

-une part mineure sera attribuée à la recherche dans le domaine considérée (de l'ordre de 5%).

Pour que cela fonctionne, il faut que la contribution reste faible au début, pour augmenter assez rapidement de manière à constituer à terme un handicap pour ceux qui n'auront pas fait les efforts nécessaires.

Prenons un exemple: la mise en place du ferroutage en France. Celle-ci se heurte à l'importance des investissements matériels à réaliser et à la difficulté à imposer un système contraignant à des entreprises de transports. Celles-ci privilégient la souplesse et la réactivité dans un contexte européen où la France reste une plaque tournante du transport terrestre de marchandises.

La contribution incitative pour le ferroutage repose sur le système suivant : elle est perçue aux péages autoroutiers, elle sera très faible au début (quelques centimes par kilomètres pour augmenter progressivement).La majorité de cette argent servira à diminuer les coûts des entreprises de transports qui accepteront de jouer le jeu du ferroutage. Une part importante ira aider aux financements des équipements nécessaires auprès des entreprises concernés (réseau ferré, SNCF et autres entreprises se lançant dans le ferroutage). Le ministère des transports sera le support administratif de la perception et de la redistribution de cette taxe. 

Voici d'autres exemples de contributions incitatives. Chacun pourra se faire une opinion sur leur viabilité.

Le développement d'un réseau TGV européen et la limitation du développement du transport aérien en Europe: Une contribution incitative, auprès des usagers de la voie aérienne est mise en place. Elle sert à financer le développement du réseau TGV. Elle est perçue sur les billets d'avion et redistribuée auprès des usagers du TGV et des entreprises participant au développement du réseau ferré à grande vitesse.

Le développement du parc automobile de voitures dites propres (sous réserve d'une définition de voiture propre, notion controversée): Une contribution incitative est demandée aux acheteurs de voitures neuves traditionnelles, en fonction du nombre de CV, elle sert à la fois à baisser le prix d'achat des voitures propres et à aider les constructeurs automobiles et les fournisseurs d'énergie a développer leurs activités dans cette voie.

La réduction de la consommation énergétique des logements : En s'appuyant sur le nouveau diagnostic de performance énergétique, une contribution incitative est demandée aux propriétaires de logements mal isolés, elle sert à financer l'isolation que d'autres propriétaires ont la volonté d'améliorer.

Les efforts des communes pour développer les modes de transports alternatifs à la voiture : En fonction des efforts réalisés par les communes pour développer les transports en commun, les pistes cyclables, le covoiturage, selon un plan adapté aux spécificités de chaque commune, la dotation globale de fonctionnement de chaque commune est modulée.

Les efforts des particuliers et des copropriétés dans le domaine du tri sélectif : La taxe sur les ordures ménagères est modulée en fonction des efforts réalisés dans le tri sélectif.

Le développement des réseaux de transports en commun : Une contribution additionnelle à la TIPP permet de réduire le prix des tickets de transports en commun et de financer le développement des réseaux.

La production d'énergie renouvelable d'origine électrique : la production d'électricité solaire, éolienne, hydraulique est aidée financièrement par une contribution demandée aux producteurs d'électricité à partir d'énergie fossile.

Le développement de l'aquaculture et la maîtrise des ressources halieutiques : une contribution sur la consommation de poissons pêchés permet le recyclage d'une partie des entreprises de pêche vers l'élevage en pleine mer et la constitution de réserve marine.

D'autres contributions incitatives peuvent être inventées sur le même principe. Ces différents exemples montrent la variété des différents contributeurs et bénéficiaires (usagers des transports, consommateurs, entreprises, collectivité territoriale, copropriétés, etc.) mais aussi la variété des modalités de perception et de redistribution : paiement au péage, paiement à l'achat de biens, dotation par l'Etat aux collectivités, alignement sur des taxes existantes...

En conclusion, quelle est l'originalité de cette démarche ? Elle évite les interférences avec le budget de l'Etat car elle est indépendante de sa gestion. Elle redonne donc des marges de manoeuvre au personnel politique qui peut se consacrer pleinement à son véritable rôle : le pilotage de l'action politique au sens noble du terme. 

Elle laisse à chaque acteur : autorité publique, entreprises ou particuliers la possibilité de faire des choix rationnels en tenant compte de l'évolution progressive et connue à l'avance du coût de la conservation de son attitude non adaptée à l'évolution de l'environnement. 

Cette démarche présente aussi l'avantage paradoxal de favoriser une meilleure gestion de l'argent public, en relançant l'économie par les avantages données aux entreprises qui feront des efforts, par les transferts des contributions vers la recherche, enfin, par le financement des administrations qui joueront un rôle dans la gestion des contributions incitatives. 

Enfin, en redistribuant directement le fruit des contributions de chacun, elle  atténue fortement les contradictions signalées au début de ce texte : l’impopularité de la taxe décroît auprès des  chefs d’entreprises et des citoyens, puisque  l’argent récolté leur revient.    De plus, le couplage taxation-incitation pour chaque contribution peut entraîner des mécanismes de compensation  visant à atténuer les inégalités sociales.

Bref, la méthode des contributions incitatives est un outil original qui peut permettre à la réflexion collective   et aux propositions du Grenelle de l’Environnement d’être  inventives et utiles à l’avenir de notre environnement.

 

Marseille, le 21 août 2007,

 

Rodrigue Coutouly"

 

 

 

 

Aujourd'hui, l'idée de contributions incitatives doit évoluer. S'il s'agit de conserver l'idée générale de micro-taxes ciblées, dont l'argent sert à investir dans les transitions écologiques. S'il faut garder l'idée que cet argent doit revenir, prioritairement, à ceux qui l'ont payé, en fonction de leurs revenus, il faut revoir la progressivité automatique qu'elle prévoyait.

L'augmentation prévue, connue et inexorable des contributions, avait pour but d'offrir un cadre stable qui aurait permis aux acteurs économiques de prendre des décisions rationnelles en connaissance de cause.

Mais cette caractéristique a aussi de multiples inconvénients: elle permet de mesurer le coût fiscal sur le long terme d'une contribution. Cette lisibilité risque de focaliser les résistances et les appréhensions des consommateurs et, par conséquent, du personnel politique.

D'autre part, la fixation, sur le long terme, d'une augmentation enlève un levier d'action pour le personnel politique.

Il semble donc préférable de laisser la liberté de tester des micro-contributions puis de les augmenter en fonction des besoins et de leur efficacité.  


Ainsi, s'il faut conserver le principe d'une progressivité facultative d'une contribution, il faut lui rajouter le principe d'une souplesse devenue indispensable dans le monde complexe et évolutif dans lequel nous vivons: souplesse du montant de la contribution qui pourra évoluer chaque année (augmenter, baisser, rester stable, disparaître), souplesse dans les choix d'attribution de l'argent récolté en fonction des évolutions technologiques de chaque secteur où on va créer une contribution. 

 

 

 

 

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10 avril 2013 3 10 /04 /avril /2013 05:45

ENR-emploi.jpg

 

Dans un article précédent, nous avons expliqué pourquoi il fallait affecter les recettes de la fiscalité environnementale aux investissements permettant la transition énergétique. Allons maintenant plus loin et regardons de quelle manière, cette démarche peut se mettre en place.

 

Examinons d'abord, la tentation actuelle du gouvernement français d'utiliser cette manne pour réduire le déficit. Si les recettes de la taxation carbone sont directement employées pour cela, celle-ci sera une charge pour les acteurs économiques (entreprises et ménages) sans profiter à l'économie, bridant notre compétitivité. Le prix politique de cette mesure sera élevé car les électeurs considéreront qu'il s'agit d'un nouvel impôt au profit de l'Etat, sans contrepartie pour eux.

Si, par contre, on se sert de cet argent pour faciliter les investissements dans la transition, les avantages se cumulent: création d'emplois, relance de l'activité économique, réduction des charges liées à l'achat d'hydrocarbures, limitation de notre dépendance commerciale à ses ressources importées, augmentation des impôts des entreprises et des salariés travaillant dans l'économie de la transition. Il y a donc ici un processus cumulatif multipliant les aspects positifs d'une démarche incitative.

Les avantages politiques de cette démarche ne sont, eux aussi, pas négligeables : tout en confortant la minorité écologique de l'électorat qui réclame une taxation carbone, elle va offrir des subventions à l'investissement aux ménages et aux entreprises, relancer les secteurs du bâtiment (isolation) et celui des énergies renouvelables, procurer des emplois. Les électeurs auront une vision favorable de cette politique.

 

Cependant, ces choix peuvent être "mal menés". Si on créé une taxation carbone globale que l'Etat récupère et redistribue d'une manière opaque ou inégalitaire, on rate les objectifs de l'opération.


Nous proposons ici, une méthode, celle des contributions incitatives, qui permet de "rentabiliser" les avantages attendus de cette démarche. Nous allons maintenant la décrire. Pour en expliquer les ressorts, on va s'appuyer ici sur une de nos propositions récentes : la contribution incitative sur le diesel. Nous renvoyons le lecteur à la lecture de ces articles, lecture nécessaire pour éclairer et préciser l'analyse que nous développons ici.

La précision fiscale de la démarche: la majorité des défenseurs de la taxe carbone imagine une fiscalité indifférenciée qui s'applique à toutes les émissions, d'une manière suffisamment forte pour dissuader les acteurs économiques.

Il s'agit d'une vision simpliste: les problèmes environnementaux sont complexes et étroitement connectés aux enjeux économiques. Il faut donc faire du "cousu main", être précis.

Illustration: la taxation sur le gasoil n'est pas seulement un problème d'émission de carbone, elle concerne plutôt l'émission de poussières nocives pour la santé. Mais le diesel est aussi un défi industriel: toute l'industrie automobile française doit ses succès des dernières décennies à des moteurs diesel performants.

Proposition: les recettes fiscales de l'augmentation du prix du gasoil sont affectées à des subventions à l'achat de véhicules hybrides ou électriques, subventions qui viennent s'ajouter au bonus dont profitent déjà les acheteurs de ces véhicules. Les constructeurs français étant performants dans l'électrique (Renault) et dans l'hybride (Peugeot), cette démarche les favorise, tout en accélérant le renouvellement du parc automobile.

C'est en multipliant les petites et précises démarches contributives que l'on atteindra les objectifs recherchés, non en instaurant une lourde et impopulaire taxe carbone, aux effets collatéraux dévastateurs.


La progressivité fiscale de la démarche: la majorité des défenseurs de la taxe carbone milite pour une fiscalité forte, pour qu'elle soit réellement dissuasive.

Il s'agit d'une représentation coercitive de cette fiscalité, celle d'une punition qui aurait pour conséquence un changement de comportement.

Les professionnels de l'éducatif (dont l'auteur de l'article fait partie) savent pourtant qu'une sanction n'a aucune chance d'aboutir sans accompagnement éducatif, sans se donner les moyens d'accompagner la sanction d'explications et de solutions qui permettent d'éviter la "récidive".

Nous défendons l'idée que la fiscalité doit être faible d'abord puis doit augmenter ensuite progressivement. Ce processus, annoncé d'emblée, assumée par les pouvoirs publics sur le long terme d'une décennie, rendra légitime et acceptable un impôt nouveau mais disposant d'une dynamique et d'une image originale.

Par exemple, pour mettre au même niveau, la taxation du diesel et de l'essence, nous proposons d'étaler ce rattrapage sur plus d'une décennie. A raison d'une augmentation d'un centime par an, cela se fera naturellement et graduellement. Cette mesure sera acceptée puisque les bénéfices de cette opération vont revenir aux automobilistes sous la forme de subvention à l'achat de véhicules hybrides ou électriques.

C'est en instaurant une fiscalité progressive que l'on va pouvoir créer une dynamique de changement: connaissant l'augmentation à la pompe du diesel, les acteurs économiques vont pouvoir anticiper, faire des choix rationnels en connaissance de cause. Une taxation carbone brutale et erratique va provoquer crispation, résistance, pression divers pour y échapper, sentiment d'injustice: cela sera contre-productif.

La justice fiscale de la démarche: les défenseurs de la taxe carbone défendent souvent des mécanismes de compensation (chèque vert) ou d'exonération pour les plus démunis. Ces approches posent des problèmes de seuils (où arrêter la compensation ou l'exonération?) et ne permettent pas aux pauvres de participer à la transition.

Nous défendons une autre démarche: l'utilisation de l'argent récolté par la contribution doit être distribué en fonction des revenus de l'acteur concerné.

Un ménage en difficulté, ou une petite entreprise aux marges financières étroites disposera de subventions à l'investissement importantes. Un ménage aisé, ou une grande entreprise multinationale ne pourra pas en bénéficier. Entre les deux, une progressivité sera instaurée.

Ainsi, la contribution (l'impôt) sera payée par tous, en fonction des émissions et des pollutions engendrées, mais l'incitation à investir pour la transition sera proportionnelle à la richesse de chacun.

Par exemple, pour la taxation diesel, la subvention pour l'achat d'un véhicule hybride ou électrique, va varier. Un ménage gagnant plus de 10000 euros par mois ne pourra pas en profiter. Un particulier dont les revenus sont inférieurs à 1500 euros par mois va pouvoir disposer, au contraire, d'une subvention maximale qui va faciliter son achat.

C'est en instaurant une fiscalité juste que l'on va permettre son acceptation par la population. Dans la démarche décrite ici, personne n'est perdant, chacun est gagnant puisque le riche pourra investir dans la transition comme le plus démuni. 

 

Réussir la transition écologique, proposer une fiscalité environnementale de qualité sont étroitement liés. Nous avons voulu montrer ici que cela ne s'improvise pas et réclame une réflexion aboutie qui ne fait pas l'impasse sur la complexité des problèmes rencontrés. Précision, progressivité, justice : la démarche choisie est résolument conçue pour permettre une pédagogie du changement. C'est indispensable si nous voulons nous donner les moyens de sortir des ornières politiques, économiques et environnementales dans lesquelles nous nous sommes fourvoyés.

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10 mars 2013 7 10 /03 /mars /2013 21:53

bandeaubas2011

 

A quoi sert le site fiscalité environnementale?

 

A tenter d'inventer des modes d'actions qui permettent au projet écologique d'être viable et désirable. Et parmi ces modes d'actions, à chercher comment la fiscalité, l'un des plus prometteurs, puisse jouer pleinement son rôle.

 

La fiscalité a mauvaise réputation, elle n'a rien de sexy et renvoie, pour beaucoup de nos contemporains à l'idée d'un Etat parasite qui se "servirait sur la bête". L'histoire de la fiscalité renvoie à autre chose: l'Etat de droit, celui qui protège et celui qui bâtit un cadre de vie au service de ses concitoyens. 

Ainsi, en France, Charles VII finance les Compagnies, qu'il va créer par l'ordonnance de Louppy-le-Châtel de 1445, par la création d'un impôt, la taille. Désormais, le roi de France dispose des moyens de battre les Anglais, de faire cesser cet interminable conflit et de débarrasser la France de la soldatesque qui vivait sur le pays.

 

Revenons à notre époque: la fiscalité écologique a d'abord été conçu dans une démarche punitive: si on veut limiter les émissions de CO2, donnons leur un prix de plus en plus élevé et le consommateur changera. C'est une vision naïve: le signal-prix est une réalitée mais elle n'est pas suffisante: aller dire à un retraité pauvre vivant dans une maison mal isolée de changer: que peut-il faire?

Puis, on y a vu le moyen commode de limiter nos "charges" sur le travail: on mélange allègrement nos cotisations retraites et chômage avec nos émissions de carbone, et on obtient un joyeux foutoir dont on se demande bien comment cela pourrait bien fonctionner de manière équilibré!

 

Enfin, petit à petit, l'opinion, prise de sagesse, commence à admettre ce que nous défendons, sur ce site, depuis des années : la fiscalité environnementale doit servir à financer la transition écologique.

 

Payer des impôts, cela  n'est jamais gai. mais si cet argent, chacun peut d'entre nous peut le récupérer, alors, le désir va naître et alimenter le changement:

Les contributions incitatives que nous défendons ont cette vertu :

-elles incitent au changement puisqu'elles augmentent progressivement. Elles offrent les ressources qui vont permettre au contribuable d'échapper à l'impôt qu'il paie.

-ce mécanisme vertueux incite à changer, crée un élan, un désir d'avancer, de bouger, de "transiter" vers des mécanismes et des investissements plus en phase avec un monde plus "vert"

-elles vont créer un élan qui entraîne un "New Deal" écologique et économique.

La fiscalité environementale peut être le truchement d'un nouveau contrat écologique entre la nation et ces citoyens, le levier d'un renouveau, c'est la conviction qui irrigue tous ce site et que l'on y analyse, secteur par secteur, article par article,

 

bonne lecture !

 

 

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19 octobre 2012 5 19 /10 /octobre /2012 06:50

 

isolants.jpg

La publication de mon article intitulé Comment favoriser l'utilisation d'isolants écologiques en relançant l'économie française? a donné lieu à des commentaires très intéressants que je publie (1) in extenso à la fin de cet article.

Cela mérite quelques points d'analyse et de précisions.

Tout d'abord, il s'agit d'une réaction classique d'industriels qui vivent toute réforme réglementaire ou fiscale comme une attaque contre leurs démarches économiques.  C'est classique dans une culture française qui favorise  la défiance généralisée, particulièrement entre l'Etat et les entreprises.

Cela démontre aussi que le système de normes industrielles, très développé en France, induit des pesanteurs conservatrices qui ne favorisent pas notre économie  (Les limites du système de normes énergétique dans le bâtiment).

Bien entendu, aucun isolant ne peut prétendre "économiser plus d'énergie qu'elles n'en nécessitent pour leur fabrication". La fabrication, le transport, la commercialisation et le recyclage d'un produit isolant nécessitent toujours de l'énergie, l'ensemble de cette énergie formant ce qu'on appelle l'énergie grise d'un produit. 

On doit aussi tenir compte des émissions de gaz à effets de serre, émissions qui sont souvent négatives pour certains isolants  dits "naturels", puisqu'ils contiennent des matériaux riches en carbone. Ces matériaux vont être stockés dans le bâtiment tout le long de la durée de vie de l'isolant, constituant un "puits de carbone".

D'une manière générale, pour la majorité des produits, les isolants "naturels" utilisent moins d'énergie grise et émettent moins de gaz à effet de serre.

La base INIES est très difficile d'accès pour le citoyen car elle est constituée de centaines de fiches techniques (une par produit), réalisées par les constructeurs eux-mêmes. Elle ne permet pas des comparaisons faciles (2).

D'une manière générale, construire une différenciation fiscale autour d'une logique de normes serait catastrophique: elle serait illisible pour le consommateur et donnerait lieu à une coûteuse guerre de tranchées entre constructeurs qui serait préjudiciable à l'économie française du secteur.

Le système fiscal que je propose est différent et vise, d'abord, à favoriser les entreprises françaises. 

La différenciation fiscale des deux taux de TVA se fait sur une base simple: votre produit est-il constitué à partir de matériaux complètement renouvelable? Si la réponse est affirmative, vous bénéficiez du taux de TVA le plus bas.

Si on raisonne à long terme, cette mesure favorise l'industrie française car cela va la pousser à choisir des matériaux renouvelables, qui resteront toujours disponibles, et à s'éloigner de matériaux issus du sous-sol qui sont, par définition, non renouvelables. L'accès à ces derniers sera, en effet, de plus en plus difficile et coûteux.

De plus, le différentiel entre les deux taux va dégager des ressources financières qui vont permettre aux entreprises françaises d'investir dans des processus de production d'isolants, basé sur des matériaux renouvelables.

Ainsi, le faible différentiel de taux de TVA ne porte pas préjudice aux entreprises françaises du secteur, l'écart étant faible au début. La progression du différentiel étant prévue et connue, les industriels pourront anticiper en connaissance de cause, les évolutions prévisibles du secteur.

Ils auront aussi la possibilité d'utiliser les financements publics pour investir dans des procédés techniques à base de matériaux renouvelables. Cet argent proviendra justement de la contribution issue du différentiel entre les deux taux de TVA.

Conclusion: la réaction de défiance des industriels provient d'un réflexe de défense compréhensible mais injustifié. Le système de contribution incitative  a été imaginé certes pour favoriser les bonnes pratiques environnementales mais il a été aussi construit pour favoriser les entreprises et le maintien de l'emploi   en France et en Europe.

 

 

 

 

 

(1)    

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"Je me permets de prendre contact avec vous à propos de votre article intitulé "Comment favoriser l'utilisation d'isolants écologiques en relançant l'économie français ?" Je travaille pour le FILMM, Syndicat National des Fabricants d'Isolants en Laines Minérales Manufacturées. Des informations au sein de votre article sont erronées et portent préjudice à la filière des laines minérales de verre et de roche. A titre d'information, je souhaite vous préciser que les laines minérales font parties des produits qui ont réalisé des Analyses de Cycle de Vie (ACV) depuis longtemps et publié leurs FDES sur la base INIES (www.inies.fr). Pour mesurer l'impact environnemental d'un produit isolant, il faut prendre en compte l'intégralité du cycle de vie de ce produit, depuis l'extraction des matières premières jusqu'à la fin de vie (démolition par exemple). Les laines minérales de verre et de roche, utilisées pour le bâtiment, permettent d’économiser plus d’énergie qu'elles n'en nécessitent pour sa fabrication, transport et élimination, ce qui a pour conséquence une réduction sensible des émissions de CO2, gaz à effet de serre des bâtiments.

La seule base de comparaison possible pour le bilan environnemental des produits est l’analyse des FDES publiées.

Il est en effet important de comparer des valeurs pour des produits ayant la même performance thermique et adaptés à la même application (c'est-à-dire même unité fonctionnelle). Les valeurs en m3 n’ont donc pas de sens et défavorisent les produits très performants comme les laines minérales.

Pour information, les usines de fabrication des adhérents du FILMM sont toutes situées sur le territoire français.

Je vous remercie pour l'attention que vous porterez à ces informations.
Bien cordialement,
Mélanie Lecardonnel. Agence DM&A."

 

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"Les laines minérales font parties des produits qui ont réalisé des Analyses de Cycle de Vie (ACV) depuis longtemps et publié leurs FDES sur la base INIES (consultables sur www.inies.fr). Les laines minérales de verre et de roche, utilisées pour le bâtiment, permettent d'économiser plus d'énergie qu'elles n'en nécessitent pour sa fabrication, transport et élimination, ce qui a pour conséquence une réduction sensible des émissions de CO2, gaz à effet de serre des bâtiments. La seule base de comparaison possible pour le bilan environnemental des produits est l'analyse des FDES publiées. Il est en effet important de comparer des valeurs pour des produits ayant la même performance thermique et adaptés à la même application (c'est-à-dire même unité fonctionnelle). 

 

Pour information, il existe 7 usines de fabrication de laines minérales sur le territoire français...

Estelle Mouton"

(2)  Par exemple, la fiche technique de l'Alphalene 50 90 mn d'Isover fait 31 pages et nécessite, pour sa lecture,  les compétences  d'un technicien du bâtiment.

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16 septembre 2012 7 16 /09 /septembre /2012 13:33

 

Suite à mon dernier article présentant les contributions incitatives, Denis Guinot réagit à mon exemple d'utilisation de voiture en libre-accès et en partage:

"votre analyse est très intéressant mais l'exemple de la contribution incitative à l'essence est cohérente pour une utilisation  essentiellement  urbaine et/ou ponctuelle. Mais quid des déplacements physiques obligatoires (hors télé-travail): infirmières à domicile, commerciaux, artisans...? "

La question est particulièrement intéressante car elle me permet de préciser quelques points essentiels concernant les contributions incitatives.

1-D'abord, il s'agit d'utiliser le produit des contributions pour sortir du tout-voiture individuel. Pour cela, les voitures en libre accès et en partage, ne constituent qu'une partie de la solution. Je développe dans d'autres articles les autres solutions complémentaires qu'il faudra développer et particulièrement les taxis collectifs, le co-voiturage organisé, les transports en commun. L'ensemble sera géré par les téléphones mobiles. Il est évident qu'il faudra répartir le produit de la contribution essence pour favoriser toutes ces composantes du nouveau système global de déplacements et de mobilités. Il s'agissait donc d'un exemple, on aurait pu prendre une autre composante du système global de déplacement. 

Dans l'exemple de la contribution choisie, à consommation constante, cette contribution permettrait de dégager plus de 50 milliards de recettes en dix ans, on peut donc parfaitement agir sur ces différentes composantes.

 

2-La question des entreprises et petits artisans utilisant leur propre véhicule pour se déplacer et aller chez leurs clients est particulière.

C'est ici que le concept de communauté d'intérêts trouve tout son sens. Il s'agit, quand on repère une communauté de contribueurs ayant des caractéristiques particulières, de la séparer des autres communautés. Il est essentiel, pour respecter l'équité et éviter le lobbying,  que les contributions demandées et leurs progressions soient rigoureusement les mêmes pour tous. Par contre, on peut séparer le produit de ces contributions pour une communauté particulière.

Dans l'exemple choisi par Denis Guinot, on peut imaginer que ces entreprises dépendantes du transport récupèrent le produit de leur propre contribution et décide de l'usage qu'ils vont en faire pour sortir de leur dépendance. Il est probable, ici, que cette communauté choisisse d'investir dans les véhicules hybrides rechargeables.

 

La communauté d'intérêts permet donc à la fois de respecter l'égalité républicaine et de tenir compte des particularismes professionnels.


 


 

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8 septembre 2012 6 08 /09 /septembre /2012 07:01

Dans le contexte de la préparation de la conférence environnementale qui aura lieu les 14 et 15 septembre, le débat portera inévitablement sur la fiscalité environnementale.

 

 

La démarche des contributions incitatives


bandeaubas2011


 

 

L'évolution de la fiscalité environnementale est une nécessité. On y a répondu, jusqu'à présent, par des solutions insatisfaisantes (1). Il nous faut maintenant inventer une fiscalité nouvelle qui contribuera efficacement aux nécessaires transitions écologiques du XXIéme siècle. 

Les contributions incitatives sont des taxations ciblées précisément sur des usages et des produits polluants,  non renouvelables et/ou fortement émetteurs de carbone . L'argent de ces contributions est intégralement utilisé pour investir dans les transitions écologiques.

Combinant taxation et investissement économique, les contributions incitatives permettent à la fois de répondre à l'urgence écologique et à la nécessaire relance d'une économie durable. Ce système fiscal permet de répondre aux besoins importants de financement que nécessitent les transitions écologiques.

Etroitement ciblées, ces contributions vont être souples dans leur mise en oeuvre. Elles pourront toucher toutes les pollutions ou les atteintes à l'environnement.  Elles permettront des négociations transparentes avec les consommateurs et les entreprises concernés.

Le signal prix sera explicite pour les acteurs économiques concernés. Ce système les met devant leurs responsabilités: soit continuer à polluer et y mettre le prix, soit investir pour en sortir et être aidé pour cela.

Comment fonctionne la méthode des contributions incitatives?

La contribution est prélevée sur une activité polluante précise. Elle est très faible mais augmente progressivement et inexorablement (la loi fixe son évolution sur une décennie). Le signal prix est donc clair: chacun peut savoir combien va lui coûter le maintien de son comportement polluant.

Une contribution incitative est étroitement spécialisée: les pêcheurs, les automobilistes, les entreprises, les propriétaires de logements, ... Ils forment une communauté d'intérêts. L'ensemble de la population contributrice, et elle seule, doit profiter de l'argent récolté.

Les recettes d'une contribution sont utilisées intégralement pour investir et subventionner des actions environnementales dans le secteur où la contribution a été prélevé. Ces investissements doivent permettre de réduire significativement la pollution concernée. 

Les subventions allouées aux contributeurs vont être proportionnelles à leurs revenus. L'argent récolté l'année N est redistribué l'année N+1 grâce à des mécanismes de régulation qui vont éviter de creuser les déficits publics.

 

Un exemple précis, la contribution incitative sur l'essence: 

Adossée à la TICPE (ex-TIPP), elle sera la première année de 2 centimes d'euro par litres. Elle va permettre de récolter 1 milliard. Le législateur aura prévu son augmentation de 2 centimes d'euros par an pendant 10 ans.  Elle atteindra alors 20 centimes et 10 milliards (2).

Cet argent va être intégralement utilisé pour sortir de l'utilisation massive et généralisée de voitures individuelles à essence. Imaginons qu'il soit décidé de développer les systèmes d'utilisation de voitures en libre-accès et en partage. Les contributions incitatives vont permettre, par exemple, de financer les stations libre-service (l'usager payant les voitures). A raison de 50000 euros par station (coût des stations auto'lib à Paris), la première année permet d'en installer des milliers, sur l'ensemble du territoire métropolitain. La puissance d'investissement permet de proposer en quelques années une couverture du territoire qui va progressivement, mais rapidement, grignoter la suprématie de la voiture individuelle.

Les usagers seront d'autant plus motivés à basculer vers des modes de déplacements partagés ou collectifs que la progression de la taxation essence sera connue et que la possibilité d'accéder à des modes "doux" de transport sera rendue économiquement intéressant par le mécanisme de subvention.


(1) Les crédits d'impôts ont démontré leurs effets pervers. L'échec de la contribution climat-énergie s'explique  par son impopularité qui fit reculer le président Sarkozy. Les projets de fiscalité "verte" au profit d'une baisse des charges du travail sont peu crédibles : la complexité de cette démarche, le mélange entre fiscalité et contrat social les rendent techniquement et déontologiquement irréalistes. Seul, le bonus-malus a été une mesure légère et efficace dont les mécanismes méritent d'être évalués et améliorés. 

(2) A condition que la consommation reste constante: on peut espérer que cette politique fiscale entraîne une baisse de la consommation et donc des recettes. Il s'agit d'une proposition. Le choix de la progression sera important à la fois pour le signal prix de long terme et pour les capacités d'investissement qu'elle va permettre. Tout est possible de la progression arithmétique présentée à une progression géométrique de facteur 2 qui, en dix ans, amène  à une taxation au litre de ... 10,28 euros!

 

 

Pour en savoir plus: les articles du site fiscalité environnementale

   

 

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23 août 2012 4 23 /08 /août /2012 09:23

 

Deux lecteurs et commentateurs réguliers de mon blog viennent de rédiger deux commentaires intéressants qui méritent ce petit billet.

 

Pierre Borie, répond à l'article Taxer le carbone pour payer nos charges sociales, une idée catastrophique  dans sa version publiée sur les Echos.  Voici ma réponse à son commentaire.

  ---------------------------------------

Monsieur Pierre Borie,

 

vous dites:  "Votre proposition de "fiscalité environnementale incitative" aboutit, si je comprends bien, à donner aux pollueurs les moyens de ne plus polluer, ce qui est une manière de les faire profiter des effets d'aubaine si coûteux pour les finances publiques. Ce n'est pas en en redistribuant le produit entre leurs mains que l'on agira efficacement, mais en les faisant payer (selon le principe énoncé par l'OCDE en 1972) à l'aune de la pollution qu'ils continueront à émettre."

  

Cela mérite précision car votre présentation déforme ma réflexion:

-les "pollueurs" sont nous tous, y compris vous et moi. Cette présentation manichéenne des "vilains" pollueurs nous fait oublier que l'ensemble de nos concitoyens polluent parce qu'ils n'ont pas le choix, de prendre leur voiture pour aller travailler, de se chauffer au gaz, ...

-faire payer une taxe carbone revient donc à punir tout le monde, y compris les personnes convaincus d'écologie et qui, pour cela, ont choisi de vivre à la campagne quand ils doivent aller travailler à la ville.

-le système des contributions incitatives n'est pas "coûteux pour les finances publiques" puisqu'il s'agit justement de réserver l'ensemble des produits des contributions pour financer la sortie de ceux qui le voudront. L'Etat ne financera plus rien et n'accordera plus ses réductions d'impôts, niches fiscales coûteuses aux effets pervers.

-le système de contributions ne financent donc pas d'affreux pollueurs mais les personnes et les collectifs qui voudront sortir de leur dépendance au carbone.

-------------------------------------

 

 

Daniel Jagline répond, pour sa part, à mon dernier article  Essence : faut-il alléger la facture pour le consommateur?  par le commentaire suivant:

 

 

  • Bien que je fais parti de celles et ceux qui seront directement touché, je crois pourtant que vous avez raisons.
    Ce qui est tout de même difficilement acceptable, c'est qu'après avoir subit des taxes très élevé en France on en arrive à cette situation, ce sont des citoyens comme moi qui ont le plus besoin de se véhiculer pour aller travailler, qui trinquerons, tout en continuant à servir de vache à lait, et cela à cause de l'incompétence de nos dirigeants qui ont été incapable d'anticiper une situation pourtant hautement prévisible.
  • 

Daniel répond indirectement à Pierre: oui, il est pollueur et captif d'un système que nous n'avons pas choisi.

Je précise que je suis personellement dans la même situation : habitant et travaillant dans Marseille, je pourrais prendre les transports en commun, mais j'aurais 3h de transport par jour et non une heure dans ma voiture ! Cela me consterne mais je ne peux rien y faire. Et ce n'est pas en me punissant comme un "vilain" pollueur  que cela va changer !

 

L'important aujourd'hui est de trouver des démarches qui permettent à tous ceux qui le désirent de sortir de ce système,  en se donnant les moyens de revoir les systèmes et d'investir dans la transition et le découplage avec l'ancienne économie. Ma réflexion -centrale- autour des contributions incitatives vise à cela.

 

Pour compléter ma réponse à Pierre Borie et à tous ceux qui croient à la taxation carbone punitive, il est intéressant de réfléchir à l'utilité de la sanction. Travaillant  cette question dans un autre cadre,(je forme des jeunes enseignants à construire leur autorité face aux élèves), on peut faire le parallèle avec l'usage de la sanction. Un professeur qui croit que seule la sanction va assurer son autorité ne va pas y arriver, c'est en responsabilisant ses élèves qu'il va se faire respecter car il va définir clairement les règles et les conséquences négatives ou positives du comportement des élèves. La sanction est un outil à utiliser avec beaucoup de doigté.

Ce que propose les défenseurs de la taxe carbone ressemble au comportement d'un jeune professeur inexpérimenté qui irait punir un élève qui refuse de lire à haute voix en classe alors que cet élève ne sait pas lire : inutile et contre-productif.

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12 août 2012 7 12 /08 /août /2012 11:21

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Le débat actuel sur les évolutions du prix du gaz est révélateur des tensions et des contradictions qui apparaissent dès qu'un sujet porte sur une question écologique. Aujourd'hui, les problèmes environnementaux ne peuvent plus être déconnecté de l'économie.

 

Une partie de l'opinion publique, soucieuse  de sociale, réclame une baisse du budget énergie qui revient de plus en plus cher aux ménages modestes. En moyenne, une famille dépense 150 euros par mois pour se chauffer, s'éclairer et faire fonctionner les appareils électriques.

Une autre partie, préoccupée de compétitivité économique, craint qu'une hausse du prix de l'énergie désavantage une industrie nationale déjà bien mal au point.

Enfin, l'opinion publique sait aussi la nécessité de financer une transition énergétique coûteuse mais indispensable pour limiter les émissions de gaz à effet de serre et accroître notre indépendance énergétique.

Comment alors financer la transition? Comment, en même temps, proposer une énergie à un coût acceptable par l'opinion?   Faisons un rapide tour d'horizon des différentes solutions proposées.

Le conseil d'Etat vient de répondre aux partisans d'une énergie à bas prix : en remettant en cause le gel des prix du gaz et en condamnant les consommateurs à payer, il démontre que la solution des tarifs réglementés n'est plus d'actualité.

Les inquiétudes concernant l'industrie sont-elles fondées? Pour l'industrie de l'aluminium, il est déjà trop tard : les groupes sidérurgiques n'investissent plus en Europe où les coûts de l'électricité sont trop élevées. Faut-il alors continuer à défendre des tarifs préférentiels coûteux pour la collectivité? Ne faut-il pas plutôt pousser les acteurs économiques à trouver des solutions énergétiques combinant sobriété, efficacité énergétique et renouvelables? 

En fait, la majorité des politiques et des experts qui travaillent sur ces questions énergétiques ont déjà fait leur choix : il faut financer la transition énergétique et limiter le coût de l'énergie par des mécanismes de compensation qui vont toucher le coût du travail ou les impôts.

 

Delphine Batho ministre de l'écologie devant la commission économique de l'assemblée nationale le 11 juillet dernier:  Quant à la fiscalité écologique, elle sera un des sujets évoqués lors de la conférence environnementale. Personnellement, je pense qu’il convient en premier lieu de rééquilibrer la fiscalité entre le travail et le capital, ce qui n’exclut pas le développement d’une véritable fiscalité écologique,

 

Guillaume Sainteny, auteur du livre "Plaidoyer pour l'écofiscalité", universitaire expert reconnu, dans un article récentdéfend  des mesures compensatoires à une tarification plus élevée de l'énergie. Ces augmentations de prix seraient compensées par des baisses d'impôts portant essentiellement sur les catégories sociales les moins aisées.

 

Ces mécanismes compensatoires sont séduisants. Ils représentent pourtant des choix discutables et dangereux à terme.  Discutables car ils vont rajouter de la complexité à une fiscalité déjà incompréhensible pour nos citoyens: dans l'"usine à gaz" du système fiscal, c'est rajouter de nouveaux "tuyaux", de nouveaux flux qu'il va falloir réguler et qui auront probablement des effets pervers. Dangereux à terme par leurs effets indirects: par exemple, des réductions d'impôts signifie reprendre la valse des niches fiscales dont on a pourtant compris qu'elles participaient aux déficits publics.

 

Que faut-il proposer alors?

D'abord, organiser de manière systématique la tarification progressive des différentes énergies. Entreprises et ménages devront profiter de ce système. Les premiers mètres cubes de gaz, les premiers kilowatt devront être à bas prix. Puis une deuxième tranche sera à prix moyen, la troisième et dernière tranche aura un prix unitaire plus élevé. La troisième tranche financera la première. Cette mesure aura deux avantages : d'abord, elle favorisera les ménages modestes qui consomment peu, ensuite, elle agira sur les comportements des consommateurs en avantageant la sobriété énergétique.

La véritable difficulté de la tarification progressive sera de déterminer les seuils des différentes tranches. Le risque étant grand d'aboutir, là encore, à une nouvelle "usine à gaz" avec de multiples seuils et pressions de toutes sortes de lobby défendant les intérêts particuliers et non l'intérêt général.

Pour sortir de cette difficulté, il paraît préférable de proposer une tarification simple, avec des différentiels de seuils peu élevé pour les rendre acceptables. Par contre, l'évolution des tarifs sera prévue et connue sur un temps assez long (une dizaine d'année) avec un creusement progressif entre les trois tranches, ce creusement se faisant avec des tranches définies en pourcentage pour pouvoir tenir compte de l'évolution économique du prix de l'énergie. De cette manière, les ménages et les entreprises pourront faire évoluer leur comportement et leur équipement pour s'adapter à une sobriété de plus en plus nécessaire. 

Une définition en pourcentage aura l'avantage de permettre de financer intégralement la mesure puisque la compensation se fera automatiquement.

 

Pour permettre de financer la transition, on propose aussi d'instituer une fiscalité environnementale sur le gaz,  énergie d'origine fossile, émetteur de gaz à effet de serre. Elle sera payé par le consommateur mais lui sera rendu -intégralement- quand il désirera investir pour sortir de sa dépendance à cette énergie. Ces contributions incitatives vont permettre au chef d'entreprise ou au propriétaire d'une maison ou d'un immeuble d'installer un système de chauffage et de production d'énergies plus économe et moins polluant.

Là encore, il faudra faire simple, taxer avec modération et de manière progressive. Cela serait une grave erreur de vouloir installer une taxation punitive car de nombreuses familles subissent un système de chauffage qu'elles n'ont pas choisi et elles n'ont pas forcément les moyens d'investir dans un système plus propre et plus économe.

Comment agir alors? En instaurant une double contribution, l'une assise sur la taxe foncière (à destination des propriétaires du logement), l'autre assise sur les consommations de gaz (à destination des habitants du logement). Cette double contribution sera très faible au début (quelques dizaines d'euros par an) avec une progression connue sur une décennie. L'intégralité des sommes récoltées par ces deux contributions va servir à investir dans des appareils plus économes.

 

Enfin, parler uniquement de la consommation de gaz dans les habitations serait oublier que 75% de la consommation de gaz est réalisée par les industriels et les entreprises. 

Il n'est pas sain, économiquement parlant, de laisser les industriels bénéficier de tarifs préférentiels, qui participent à l'augmentation de l'effet de serre d'une part, mais qui, d'autre part, vont plomber -sur le long terme- les profits d'entreprise dont l'énergie dépend d'une ressource non-renouvelable dont les prix sont condamnés à monter.  

Le mécanisme de contributions incitatives, que nous avons décrit plus haut pour les ménages, doit donc s'appliquer de la même manière. Les chefs d'entreprises vont payer une très faible contribution au début, mais ils savent qu'elle va augmenter. Ils pourront alors faire des choix rationnels en connaissance de cause. Ils savent aussi qu'ils pourront bénéficier du produit de cette contribution pour faciliter les investissements nécessaires pour  sortir de leur dépendance au gaz.

 

Conclusion: contrairement aux mécanismes fiscaux classiques envisagés (taxe carbone, création de niches fiscales, taxation écologique compensant les "charges" sur le travail, ...), les contributions incitatives sont simples, cohérentes, lisibles et logiques: on contribue simplement au financement du changement de système.

Le gaz constitue une de nos principales sources d'énergies, nous n'avons pas d'autres solutions que d'en sortir en investissant dans d'autres systèmes énergétiques. Il va bien falloir en payer le prix. C'est la seule fonction d'une fiscalité environnementale mature: favoriser cet investissement.

 

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4 mars 2012 7 04 /03 /mars /2012 07:13

 

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Les lecteurs réguliers du site Innovation politique/fiscalité environnementale le savent. L'auteur de ce think tank artisanal défend inlassablement la même idée: celle d'une solution politique fiscale appelée contributions incitatives. Cette démarche a des difficultés à émerger car elle apparaît complexe. Or, il s'agit d'une méthode finalement simple, quand on en a compris les grands principes. 


1-Les clés de la méthode des contributions incitatives

L'adossement: Chaque contribution  incitative n'est pas un nouvel impôt. Il s'agit d'une méthode différente appliquée à un impôt déjà existant. On ne va pas créer une fiscalité nouvelle avec des impôts supplémentaires

 

La multiplicité: C'est le premier principe des contributions incitatives. A chaque problème, ayant sa propre logique et sa propre cohérence, on applique une nouvelle contribution adaptée. Il s'agit donc d'une spécialisation raisonnée des contributions. Chacune correspond à un problème donné, à une population particulière, ayant des préoccupations collectives, une communauté d'intérêts. Une contribution peut avoir des applications dans le champ environnemental mais elle peut exister aussi dans le domaine social ou financier.

La différenciation: C'est le deuxième principe  des contributions incitatives. On distingue, pour chaque contribution incitative, un seuil exigeant. Si on l'atteint, on bénéficie de la contribution. Si on ne l'atteint pas, on participe à son financement. On participe selon le principe de la proportionnalité des contributionsC'est donc une nouvelle application particulière  de la démarche du bonus-malus. 

La progressivité: C'est le troisième principe de la méthode incitative. Les sommes demandées sont très faibles (de l'ordre de 1 à 5% de l'impôt sur lequel il est adossé). Mais leurs augmentations sont prévues et connues (au minimum sur une décennie). Augmentant de manière inexorable, chaque acteur économique va devoir prendre des décisions rationnelles en fonction de son évolution.

S'il faut conserver le principe d'une progressivité facultative d'une contribution, il faut lui rajouter le principe d'une souplesse devenue indispensable dans le monde complexe et évolutif dans lequel nous vivons: souplesse du montant de la contribution qui pourra évoluer chaque année (augmenter, baisser, rester stable, disparaître), souplesse dans les choix d'attribution de l'argent récolté en fonction des évolutions technologiques de chaque secteur où on va créer une contribution. 

 

Le financement des investissements: C'est le quatrième principe de la méthode contributive. La totalité des sommes récoltées va être utilisée pour investir dans le même secteur, auprès de la communauté d'intérêts, auquel la contribution a été demandé. Les sommes récoltées l'an N sont investies l'année N+1.

Il s'agit donc d'une démarche d'auto-contribution. Auto-contribution collective d'abord, puisque l'ensemble des contributeurs devient bénéficiaire de l'argent collecté; auto-contribution individuelle parfois, puisque un contributeur particulier pourra -sous certaines conditions- jouir de l'argent qu'il aura donné.

Le découplage du budget de l'Etat: Une contribution incitative ne peut donc pas être intégrée au budget de la Nation. Elle est recueillie sur un fond propre, qui gère cet argent et le redistribue.

L'auto-régulation: argent récolté aussitôt rendu et investi, les contributions incitatives disposent de mécanismes d'auto-régulation qui doivent permettre d'équilibrer les comptes. Une contribution ne doit jamais coûter au budget de la Nation, comme il ne doit pas servir à payer les dettes de celle-ci.

Parmi ces mécanismes d'auto-régulation, on trouve celui de l'équité fiscale (le don donné au contributeur pour investir va fluctuer selon ses revenus) et celui de la variabilité des dons (le don donné au contributeur va être modulé selon l'évolution de la demande d'investissement). 

Le pilotage concerté: Le rôle du pouvoir législatif sera de définir une contribution, d'en déterminer l'assiette et son évolution sur une décennie. Le rôle du pouvoir exécutif sera uniquement de déterminer les conditions de son pilotage. Celui-ci dépendra de comités appliquant le principe de co-gestion. L'exécutif définira les membres de chaque comité de pilotage. Le plus souvent, établi au niveau régional, présidé par un politique, il sera composé paritairement  d'élus, de représentants syndicales, de chefs d'entreprises et des associations du secteur concerné par la contribution particulière gérée par ce comité de pilotage singulier.


Les valeurs fondamentales des contributions incitatives

L'acceptabilité: Progressant lentement, commençant très bas, une contribution ne doit pas être une charge excessive pour le contribuable. Elle ne doit être dissuasive que sur le long terme puisque son évolution est connue sur dix ans.

La lisibilité: Pour le contributeur, la démarche proposée doit être limpide. On connaît le champ d'application et l'évolution du nouvel outil fiscal. Chaque année, on communique les possibilités d'investissement dans ce secteur particulier. La loi puis le comité de pilotage encadre chaque contribution.

La compatibilité avec les législations en vigueur: Respect de la constitution de la République française, compatibilité avec les règles européennes. Strictement spécialisées, et donc précises, ne dérogeant pas au principe des libertés, pourvu de mécanismes garantissant l'équité, il n'y a pas de raison que les contributions incitatives soient attaquées sur le plan du droit.

La liberté persuasive : En effet, les contributions incitatives ne sont pas contraignantes. Chacun peut décider de ne pas appliquer le changement auquel elles incitent. Le choix est laissé au contributeur contribuable. Mais il est incité au changement parce qu'il connaît l'évolution sur le long terme de la contribution et parce qu'il peut bénéficier pour cela d'une aide à l'investissement.

La méthode des contributions incitatives fait donc le pari d'un individualisme altruiste. Chacun peut choisir mais il le fera en fonction de sa situation particulière, en ayant la lisibilité nécessaire à ses choix. On peut raisonnablement penser que les valeurs de solidarité et les préoccupations environnementales vont pousser une majorité d'acteurs économiques et de citoyens à faire des choix responsables.

Il s'agit donc bien d'une démarche gagnant-gagnant qui  ne cherche pas à opposer mais à rassembler chacun autour d'une méthode commune, où tous s'y retrouvent mais où la liberté de chaque personne est préservée; une méthode qui s'efforce de promouvoir l'égalité et de ne pas laisser de vaincus.


Résumé:

La méthode des contributions incitatives repose sur une dialectique forte et dynamique, résolument innovante. Il s'agit à la fois d'inciter et de contribuer.

Inciter chaque acteur/contribuable à faire des choix individuels rationnels mais éclairés au bénéfice à la fois de sa propre personne mais aussi de la communauté et de la société auquel il appartient.

Contribuer au changement, à la fois par une participation financière raisonnée et raisonnable, mais aussi par une implication nouvelle, par des choix et des investissements éthiquement responsables. Ecologie, énergie, emploi, solidarité, les champs d'application des contributions incitatives varient mais elles ont toutes la même finalité: faire évoluer la société, de manière effective, significative, partagée, acceptée.

La démarche des contributions incitatives n'est pas compliquée. Elle est seulement complexe, comme l'est nos organisations sociales. Si la société s'en empare, le personnel politique retrouvera un levier d'action efficace alors qu'il n'en dispose plus aujourd'hui.

Promouvoir les contributions incitatives, c'est oeuvrer pour une responsabilisation nouvelle du personnel politique, c'est redonner du sens à l'acte politique. 

Pour en savoir plus:

Sur la méthode des contributions incitatives

Sur son application dans certains secteurs de l'action politique et environnementale: voir les différentes thématiques du site (dans le bandeau à gauche).

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5 février 2012 7 05 /02 /février /2012 14:55

 

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Plus nous nous enfonçons dans la crise, plus les illusions et les masques tombent, plus l'opinion publique commence à se convaincre de la nécessité d'organiser la transition énergétique vers une société plus sobre et consommant essentiellement des ressources renouvelables.

Si on est convaincu de la nécessité de cette transition, se pose alors la question de son financement: isolation des bâtiments, appareils sobres, fermeture des centrales nucléaires, création de multiples sources d'énergies renouvelables, la facture se compte en centaines de milliards. Comment financer ces énormes investissements?

Le modèle classique keynésien est celui de la relance par l'Etat. Celui-ci finance en partie, soit directement, soit par des crédits d'impôts, puis le marché fait le reste. Mais on voit bien, en ces temps de déficit chronique, que la méthode ne fonctionne plus. A écouter les économistes libéraux, il ne reste donc plus qu'à attendre que le marché, dans sa "grande rationalité", fasse émerger seul les ENR. On peut en douter.

 

Tous ceux qui sont convaincus de la nécessité de réaliser la transition énergétique, se posent la même question: comment la réussir? 


Nous disposons maintenant, avec le scénario Négawatt, d'un modèle qui nous permet d'imaginer l'avenir. Nous connaissons le scénario de la transition. Mais nous avons besoin d'inventer les leviers concrets qui vont permettre d'agir. Il nous faut démontrer la faisabilité de ce scénario aux responsables politiques en charge de conduire la Nation. Pour cela, nous devons leur fournir aussi les outils qui vont leur permettre d'entreprendre les réformes dont nous avons besoin.

 

Nous nous trouvons en effet dans une période de remise en cause de la politique traditionnelle. Légiférer, réglementer, taxer, détaxer : les  instruments habituels du pouvoir étatique semblent de  plus en plus désuets et inefficaces face à la complexité croissante de nos sociétés en crise. Cette inanité du politique se trouve renforcée par la crise des dettes. L'Etat a perdu son instrument d'action le plus puissant : celui de l'usage des financements publics pour impulser des politiques publiques de qualité.

 

Or la transition énergétique a un coût: convaincre le pouvoir politique signifie donc lui prouver que ce scénario est économiquement viable dans un contexte défavorable de crise économique.

 

Il nous faut donc inventer une autre manière de financer la transition énergétique. Et pour cela, on sait bien que la fiscalité joue un rôle crucial. Mais nos sociétés ont changé : l'impulsion centralisatrice qui ne fait pas confiance aux acteurs est une conception de la société dépassée. Les individus et les acteurs économiques veulent aujourd'hui devenir parti prenante de leur choix de vie. Le niveau d'éducation et le réseau internet ont permis une diffusion de l'information et des idées.

La fiscalité classique, celle où l'Etat prend de l'argent aux contribuables et redistribue cet argent, selon ses choix propres, ne peut plus être la bonne réponse face à des sociétés de plus en plus complexes, où il est nécessaire de laisser les acteurs prendre les initiatives. L'Etat a pourtant toujours son rôle à jouer, c'est à lui de donner les impulsions et de définir le cadre. Mais il doit, dans la fiscalité, comme ailleurs, laisser les citoyens et les entreprises faire leur propre choix.


Les politiques publiques dépendent étroitement de l'efficience des outils fiscaux utilisés. Taxe carbone, TVA sociale, Taxe Tobin, ... : ce n'est pas un hasard si le débat politique porte souvent aujourd'hui sur leur efficacité.

 

 

Les concepteurs du scénario Négawatt ont d'ailleurs, pour leur part, fait la proposition de créer une contribution environnementale sur les énergies primaires et les externalités environnementales (Cepex). Ils sont convaincus de la nécessité d'agir sur le prix de l'énergie.

 

Cette approche est la bonne. Mais, nous proposons d'aller encore plus loin dans cette réflexion sur la fiscalité environnementale et les prix de l'énergie. Nous devons en effet imaginer un système efficace qui puisse répondre aux exigences suivantes:

-amener les acteurs économiques (les ménages et les entreprises) à changer de pratiques dans le domaine énergétique

-les convaincre de cette nécessité

-les aider à financer cette transition

-la rendre acceptable pour les plus pauvres et les plus en difficulté

-convaincre les entreprises de l'énergie (celle du nucléaire particulièrement) de rentrer dans ce processus plutôt que de s'y opposer.

-se doter des moyens de financer la transition énergétique.

 

Il faut donc inventer une fiscalité innovante au service de la transition écologique et énergétique. Cela sera le sujet de plusieurs   articles, publiés dans les jours à venir, que de présenter les grandes lignes de cette nouvelle démarche fiscale.

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