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Il faut demander plus à l'impôt

et moins aux contribuables

 

Alphonse Allais

 

Outil fiscal

Les contributions incitatives sont des micro-taxes payées sur les activités polluantes. L'argent récolté permet aux plus démunies d'investir dans les transitions écologiques et énergétiques. 

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Un résumé de la pensée de l'auteur sur la crise écologique 
7 août 2011 7 07 /08 /août /2011 07:31

 

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Aujourd'hui, l'expression Développement Durable est employée de manière courante : colloques, rapports et autres articles, discours... Chaque grande entreprise se doit de posséder son responsable Développement Durable. Les programmes scolaires français de géographie l'utilisent comme une notion fondamentale. Et les grandes entreprises font toutes du développement durable même celles qui exploitent les ressources de la planète et qui se contentent de quelques actions médiatiques "vertes" pour soigner leur image !

Or cette généralisation interroge alors que le concept de Développement Durable reste contesté.

On connaît la polémique provoquée en France par la parution, en 2008, du petit livre de Sylvie Brunel consacré à cette question. Elle critiquait cette notion qu'elle opposait à celui de développement : "Pour que le développement soit durable, encore faut-il qu'il y ait développement". Certes, sa vision radicale qui opposait les hommes à l'écologie ("la planète évince l'Humanité") a choqué de nombreux écologistes dont j'ai fais partie.

Pourtant, quand on voit l'usage immodéré que l'on fait de l'expression, je pense qu'elle avait probablement raison. Le développement durable se révèle une expression bancale et floue, utile pour "verdir" l'image des entreprises et du personnel politique et pour se donner bonne conscience. Mais est-elle efficace pour l'environnement? 

Il s'agit d'une expression contradictoire dans ses termes : le développement est un processus de construction de longue haleine ; la notion de durabilité renvoie au contraire à un état stable que l'on aurait atteint et qu'il faut, par définition, maintenir. 

Ce paradoxe, interne à l'expression, appauvrit chacun des termes qui la compose. Le développement n'est plus forcément le développement des sociétés humaines mais le développement de toute entité qui s'empare du concept. La durabilité est utilisé à tort et à travers : les territoires, l'avion, le pétrole deviennent durable.

L'utilisation conjointe de ces deux termes finit par ôter toute crédibilité à l'expression. Dès lors, la généralisation de son emploi finit par poser problème car il ôte toute fiabilité à ceux qui l'utilisent. Finalement, l'expression semble n'être qu'un mot valise de plus, une formule recopiée participant d'une langue de bois technocratique qui renforce les populismes et affaiblit la cause environnementale.

Pour y voir plus clair, il faudrait distinguer:

-le Développement, qui concerne les pays du Sud: un processus en cours chez eux pour atteindre un niveau de vie, d'éducation et de santé que nous avons déjà atteint. 

-la responsabilité environnementale qui doit être celle de chaque acteur (entreprise, individu, administration, ...) à faire ce qu'il peut dans l'intérêt de la planète.

-la société (et l'économie) durable qui est un objectif à atteindre pour les pays du Nord: ne plus épuiser nos ressources, construire un système sociale de bien-être qui puisse être pérenne, sortir de nos dépendances en bâtissant une économie circulaire qui garantissent notre autonomie. C'est ambitieux mais c'est une ambition nécessaire pour nos sociétés: Une forêt, correctement gérée, est une économie durable. Il faut que cette démarche devienne celles de l'ensemble des économies et des sociétés.

 

La France s'est fait malheureusement une spécialité de l'usage langue de bois de mots et d'expression utilisés et ressassés pendant un certain temps dans les milieux universitaires d'abord, puis dans les médias. Ils passent ensuite de mode (qui se souvient du "politiquement correct" rabâché il y a quelques années?) mais leur usage immodéré a appauvrit le débat.


 

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22 janvier 2011 6 22 /01 /janvier /2011 07:21

tunisie-revolution.jpg 

Comment expliquer la cécité et l'ignorance des élites françaises concernant la situation tunisienne?

La révolution du Jasmin en Tunisie fut un événement spectaculaire qui surpris le plus grand monde et particulièrement les élites françaises. Immédiatement après, lors du week-end, on a vu tout le gratin des journalistes, des intellectuels, des "experts" et des politiques participer à des débats à la radio et à la télévision. Manifestement, ces débats avaient surtout pour objectif de former et d'informer ces élites sur la situation tunisienne, qu'ils ne connaissaient pas. Des séances de formation de rattrapage en direct pour les citoyens comme pour leurs dirigeants! Après tout, même l'ambassadeur de France à Tunis pensait, quelque heures avant le départ de Ben Ali, que cette révolution ne pouvait se produire !

Cherchons à comprendre les raisons qui expliquent ce décalage entre la réalité tunisienne et notre vision,  décalée et fausse, en raison des analyses erronées véhiculées depuis des années dans les  médias.

Passons rapidement sur l'explication qui nous a été servie par les journalistes et les experts pour expliquer leur incurie: Ben Ali nous (leur?) a vendu son régime en se posant en rempart contre l'islamisme. On peut s'interroger sur les dessous de cet argument: n'est-ce pas un aveu d'incompétence puisque c'est reconnaître finalement qu'on a été roulé dans la farine par le dictateur tunisien? L'absence, et le silence, des islamistes, pendant et après les événements, renforce ce sentiment d'avoir été trompé, accentue l'impression que nos élites ont eu la paresse de croire ce personnage vénal. Elles ont accepté de vendre leur âme au diable, de laisser piller ce beau pays en échange d'un bouclier inutile et vain.

Cette erreur a été renforcé, chez certains de nos experts, par une vision post-coloniale de la Tunisie, considérée comme n'étant pas assez "mûre" pour accéder à une "vraie" démocratie comme serait la nôtre.

Mais il ne faut pas se contenter de cette analyse. L'aveuglement de nos élites a bien d'autres causes. Je distingue pour ma part, trois autres explications, qui trouvent leurs racines dans des représentations erronées sur notre planète et, particulièrement, sur les pays en développement.

La première de ces représentations faussées est la méconnaissance de la force de l'Internet. Dans nos vieilles démocraties et surtout dans les dictatures, les médias classiques sont plus visibles mais de moins en moins crédibles. Notre monde est passé, en une décennie, d'un univers dominé par des entreprises médiatiques de grande taille à un éclatement de la circulation de l'information, une implosion entropique, au bénéfice de la multiplicité des sites internets, des blogs. Ce phénomène ressemble,  à l'échelle planétaire, à l'explosion des radios libres en France au début des années 80, qui a rompu le monopole des grandes radios de l'époque. 

On est passé d'une logique de tuyaux à une logique de réseaux, à un univers totalement éclaté, qui a permis, en Tunisie, de contourner la censure, de faire circuler l'information et de partager une analyse collective de la situation par la société civile tunisienne. Il n'y a donc plus quelques leaders charismatiques, mais une multiplicité de points de vue, de bloggeurs, de journalistes auto-proclamés. Cette communauté a construite, devant l'obstacle que représentait Ben Ali et ses sbires, une stratégie de combat commune, partagée et réactive. Elle était totalement inconnue de nos experts et journalistes français.

En effet, l'univers médiatique permet à une minorité, en se cooptant mutuellement, grâce à des codes sociaux partagés, de rester "entre soi". Cette minorité ignore le bouillonnement de l'Internet et n'a donc pas toujours conscience de la révolution en cours. Le village planétaire de Marshall McLuhan ne concerne plus uniquement les élites, il s'est élargit à toutes les populations lettrés, assez armées à la fois intellectuellement et du point de vue informatique pour participer au village global, en Tunisie, comme partout dans le monde.

 

Cette émergence de populations lettrées, actrices engagées dans leur destin politique permet de comprendre la deuxième représentation fausse de nos élites françaises. Elles n'ont pas vu venir le développement d'une moyenne bourgeoisie tunisienne, éduquée, formée, volontariste qui ne pouvait plus accepter la mainmise du pays par les familles BenAli-Trabelsi. Cette vision erronée était accentuée par la croyance en un islam rétrograde, analysé comme antinomique à un Occident toujours perçu comme seul porteur de la modernité.

Or, en Tunisie, comme en Turquie, dans les sociétés urbaines, dans les classes moyennes, l'Islam a su s'adapter à la fois à la modernité technique mais aussi aux aspirations en matière de moeurs de populations qui n'acceptent plus l'Islam rétrograde de la Charia. La confusion entre Islam et société patriarcale, issu du monde rural, a caché à nos experts l'émergence d'une culture aussi moderne que la nôtre dans bien des domaines, même si celle-ci reste cantonnée encore à une minorité éclairée de musulmans dans le monde. 

Le parallèle, fréquent dans la bouche des Tunisiens eux-mêmes, entre Révolution française et Révolution du jasmin, provient probablement aussi de la similitude entre les classes bourgeoises françaises du XVIIIéme et les classes moyennes  tunisiennes du XXIéme siècle : elles ont joué le même rôle moteur dans leur processus d'émancipation politique.

 

Il ne faudrait pourtant pour oublier le rôle des classes populaires. Or, ici encore, l'étincelle a été allumé par le peuple. C'est la troisième erreur de nos élites : elles négligent l'élargissement et le creusement du phénomène de pauvreté.

Le symbole de la Révolution tunisienne n'est-il pas la baguette de pain brandie dans les manifestations?  

Nos analystes, aux vies confortables, négligent le processus en cours sur l'ensemble de la planète : la vie des pauvres gens devient de plus en plus difficile. Le coût des denrées de base, alimentaire particulièrement, ne cesse d'augmenter. 

Des "experts", prisonniers de leurs préjugés, nous expliquent que ces augmentations sont conjoncturelles, liées à la spéculation. Elles ne veulent pas considérer que, partout sur la planète, la densification des populations va de pair avec la raréfaction des ressources alimentaires. Erosion et artificialisation des sols, épuisement des ressources minières et des stocks de poisson, pollution et concurrence pour les espaces se conjugent pour accroître les tensions entre les populations. Les plus pauvres, plus fragiles, en paient généralement le prix les premiers.

Or, ces populations fragiles sont bien davantage politisées et éduquées que les gueux des siècles précédents. Le développement concordant de l'éducation, de la santé et des médias les ouvrent aux convulsions de la planète. Malthus n'est pas loin mais d'une manière bien différente de celle qu'il imaginait.

 

 

Depuis le départ de Ben Ali, les commentateurs se posent sans cesse la question de savoir si cette révolution tunisienne va s'élargir aux autres populations des pays arabes.

Par erreur d'appréciation, il est probable qu'elles se trompent une nouvelle fois. Car cette révolte réussie n'est pas caractéristique de la culture arabe ou du monde musulman.

Les trois spécificités que nous venons de mettre en évidence (la puissance d'Internet, le volontarisme des classes moyennes, la révolte des pauvres) sont, au contraire, communes à tous les pays développés, ou en cours de développement. Comme en Tunisie, combinées avec la prédation des plus puissants, elles constituent un cocktail détonnant.

Aussi, en définitive, dans les décennies à venir, le modèle de la révolution tunisienne peut s'étendre partout où les plus puissants refusent de partager les richesses. Il peut renaître dans tous les pays où les élites pratiquent l'autisme et s'enferment dans "l'entre soi". Il va donc falloir qu'elles ouvrent les yeux et changent de discours.

 

Pour en savoir plus:

crises économiques/écologiques

  

 



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1 juin 2010 2 01 /06 /juin /2010 17:52

      maroc.jpg


Je commence un travail de comparaison entre  les Etats (benchmarking politique) : comment s'emparent-ils de l'outil de la fiscalité environnementale?

Dans le monde francophone, de manière assez étonnante - car on attendrait plutôt un pays très développé - une nation se distingue : le Maroc. La réflexion sur la question, la mise en place de politiques fiscales (certes encore frustres) y sont souvent plus avancées qu'ailleurs.


On peut expliquer ces particularités par plusieurs facteurs :

-La volonté du Roi, Mohammed VI, qui a exprimé clairement, dans ses discours, sa position : "Le développement industriel et la promotion touristique devront s'opérer dans une logique de développement durable, (...). Les projets réalisés et ceux à venir doivent désormais obéir à un cahier de charges précis (...), qui concilie les impératifs du développement socio-économique et la préservation de l'environnement et le développement durable". (voir le discours du trône 2009 particulièrement qui a joué un rôle accélérateur dans ce processus).


-Cette prise de conscience, à la tête de l'exécutif, est partagée par une frange de plus en plus nombreuse des élites de la Nation marocaine. Elle s'explique par les particularités d'un pays dont le développement repose, en grande partie, sur un tourisme qui profite de milieux naturels exceptionnels. Ce pays  a aussi un important potentiel en énergies renouvelables  grâce à son littoral océanique venté, à son climat ensoleillé et à une topographie montagneuse favorable aux installations de pompage-turbinage régulant ces ressources irrégulières.

 

Ce volontarisme est à la source d'une dynamique qui emprunte plusieurs chemins complémentaires :


-le pilotage général d'une politique d'ensemble autour du Conseil National de l'Environnement et de la charte de l'environnement qui en constitue le fil directeur.


-une réflexion des chercheurs marocains autour de ces questions Citons par exemple  Hamid RHIOUANI   qui a travaillé sur le coût du laissez-faire écologique dans le royaume cherifien dans la lignée de Nicholas Stern (études méso-économiques) ou  Mohammed BAJEDDI  qui a étudié le marché de l'environnement au Maroc. Cette réflexion s'est structurée autour de l'association AMEDE (association marocaine des experts en gestion des déchets et en environnement).


-une prise de conscience des milieux économiques marocains. La réflexion est devenue collective autour, par exemple,  de la structure transnationale du  Réseau des entreprises maghrébines pour l´environnement.


-le lancement de nombreux projets de productions d'énergies renouvelables. Citons le parc éolien à Akhfenir   de 100MW, la station de pompage-turbinage d'Afourer  remarquable projet innovant, et même la future centrale combinée d’Aïn Béni Mathar qui comportera un module solaire de 20 MW.


-l'instauration de fonds dédiés dont les plus connus sont le FNE (fond national pour la protection et la mise en valeur de l'environnement) et le FODEP (fonds de dépollution industrielle). Ces fonds sont de bonne augure pour l'instauration d'une fiscalité environnementale cohérente et diversifiée, car ils révèlent l'appétence d'une société réceptive à la fois aux problèmes environnementaux et à des solutions concrètes passant par des outils fiscaux.

 

Ces atouts ne doivent pas cacher les difficultés et les handicaps du pays en ce domaine : une bureaucratie source d'inertie, une population, qui dans son ensemble, n'est pas réceptive, aux problèmes environnementaux et une coordination largement perfectible des différents programmes ministériels.

 

Conclusion : Le Maroc, pays en développement, semble être un des pays les plus réceptifs à la mise en place d'une fiscalité environnementale de deuxième génération. Son statut avancé accordé au Maroc en 2008 par l'Union Européenne pourrait être le levier qui lui manque pour déclancher le processus de sa mise en place.


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