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Il faut demander plus à l'impôt

et moins aux contribuables

 

Alphonse Allais

 

Outil fiscal

Les contributions incitatives sont des micro-taxes payées sur les activités polluantes. L'argent récolté permet aux plus démunies d'investir dans les transitions écologiques et énergétiques. 

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Un résumé de la pensée de l'auteur sur la crise écologique 
28 août 2011 7 28 /08 /août /2011 12:07

 

gaz-eau.jpg

 

De temps en temps, on entend parler sur le net, et dans quelques revues spécialisées, de la mise en place de tarifications progressives pour l'eau, l'électricité, l'essence ou le gaz. Cette idée particulièrement intéressante n'a pourtant que peu d'échos dans les partis politiques et les médias traditionnels, (ce qui en dit long sur leurs carences en matière de veille sur l'innovation politique !). Nous voudrions, dans cet article, faire le point sur cette démarche, ces qualités et les freins qu'elle peut rencontrer.

De quoi s'agit-il? Pour l'un de ces consommables, de plus en plus chers, on demande une tarification progressive selon la consommation annuelle rapportée par habitant. Les premiers m3 ou kWatt sont payés à un taux très intéressant. Les consommations moyennes gardent des niveaux de tarifs moyens puis les surconsommations sont surpayées. 

Cette démarche  est demandée par ATD-Quart monde pour l'électricité qui trouve là un moyen de faire payer moins cher un bien devenu vital aux populations défavorisées.  Elle est expérimentée, pour l'eau, par la communauté de communes de Moselle et Madon depuis l'été 2009. La commune de Libourne vient de mettre un petit prix pour les premiers m3 d'eau. 

Dans cette commune, les 15 premiers m3 "vitaux" sont facturés 0,10 € HT/m3) puis "l'eau utile" est facturée 0,70 € (16 à 120m3), l'eau "de confort" (supérieur à 120m3) étant vendu au tarif de 0,75€.

La facturation progressive poursuit un triple objectif : d'abord réduire les factures des moins favorisés qui souffrent particulièrement en cette période de crise. Ensuite, en faisant payer plus cher les gros consommateurs, cette démarche participe à la lutte contre les inégalités puisque les plus aisés vont payer pour les plus pauvres. Enfin, cette tarification progressive va obliger le consommateur à regarder ses compteurs avec attention. En fait, elle peut faciliter la mise en place de la nécessaire sobriété, qu'exige la société durable (limitation de nos consommations d'eau et d'énergie).

 

Les avantages de cette méthode sont son faible coût et sa facilité de mise en place. Il suffit d'un personnel politique qui ait le courage politique de l'imposer! Elle peut facilement être mise en place quand il y a un compteur unique (eau, gaz de ville, électricité) mais elle le serait beaucoup plus difficilement pour les consommations ponctuelles (essence à la pompe, bouteille de gaz)

 

On imagine par contre les résistances énormes que cette démarche pourra rencontrer:

-celle des classes favorisées qui vont devoir surpayer leur consommation et compenser les faibles tarifs des petits consommateurs.

-celle des sociétés faisant commerce de ces flux (GDF Suez, Lyonnaise des Eaux pour prendre deux exemples). Elles n'ont pas forcément intérêt à voir la sobriété s'imposer car cela risque de diminuer leurs marges sur le long terme.

 

La méthode mériterait donc d'être peaufinée :

-il faudrait préférer une logique législative qui l'imposerait à des initiatives locales qui resteraient marginales. Mais quel parti aura le courage politique de le faire?

-il faut utiliser une méthode "douce" d'installation qui ne soit pas trop violente pour les différents acteurs. Installer des petits écarts de tarifs mais - par la loi- prévoir le creusement progressif de ces écarts.

 

en conclusion, deux remarques:

-on a souvent tendance à opposer écologie et politique de gauche. On voit bien ici que l'aide aux plus démunis peut être AUSSI une manière d'aller vers une politique de sobriété écologique.

-on a parfois du mépris pour les politiques réglementaires et la fiscalité accusées de favoriser les plus puissants. On voit bien ici que la facturation progressive est une politique volontariste au service des peuples et de la Planète.

 

Pour aller plus loin:  Augmentation des tarifs d'énergies, comment en sortir?

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22 août 2011 1 22 /08 /août /2011 18:07

 

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Le rapport de Terra Nova consacré à la maîtrise de l'Energie, rédigé par un groupe de travail présidé par Alain Grandjean est pertinent et intéressant. Faisons-en une lecture critique.

 

 

 

Relevons les points sur lesquels nous sommes en accord. Tout d'abord, la nécessité de revoir la loi NOME pour sortir le nucléaire des règles de marché. C'est un des principaux enseignements de Fukushima : la libéralisation du nucléaire ne peut être totale car elle met en péril la sécurité des centrales. Il faut disposer d'un financement pérenne et sûr qui permette d'assurer cette sécurité.

 

Autre point d'accord: les contributions, relèvements de tarifs et autres taxes doivent servir deux objectifs:

-venir en aide aux plus démunis qui vont subir, davantage que d'autres, les hausses des tarifs de l'énergie

-et surtout, financer les investissements nécessaires pour construire une politique durable de maîtrise de l'énergie.

 

 

Relevons une imprécision du rapport : il est fait plusieurs fois (pour l'automobile, le bâtiment) la proposition de mettre en place des systèmes de bonus-malus "rénovés". Au regard du bilan mitigé du bonus-malus auto actuel, on aimerait en savoir plus sur ces propositions de rénovation de ce système . 

Pour ma part, dès avril 2008, j'avais analysé les faiblesses du système de bonus-malus et proposé des modifications.

 

 

Venons-en d'abord aux points de divergences. Passons rapidement sur nos positions sur le nucléaire qui sont, par principe, différentes. Celle de Grandjean et de son équipe est de défendre le nucléaire "jusqu'en 2025" au nom du réalisme (les ENR ne peuvent répondre à la demande et le risque est grand de voir les énergies fossiles compenser l'abandon du nucléaire). Je crains fort, pour ma part, que cette position engage notre pays dans de nouvelles tranches nucléaires, qui auront un double inconvénient. D'abord, de nécessiter de nouveaux investissements qui ne pourront se faire, par arbitrage, qu'au détriment des ENR. Ensuite, on sait que le nucléaire a un coût croissant (souvent non chiffré) en fin de vie et après fermeture des centrales. Relancer de nouvelles tranches signifie donc faire payer à nos descendants le maintien de cette politique.

Je préfère donc le scénario Negawatt qui préfère "mettre le paquet" sur les ENR et organiser la sortie raisonnée du nucléaire au fur et à mesure de leur montée en charge.

Pour que cela marche, il faut organiser la montée en puissance de la sobriété énergétique. Or, Grandjean prévoit pour cela essentiellement une politique d'augmentation du prix de l'énergie qui "pousseraient" le consommateur à limiter ses consommations.

On se doute bien de l'insuffisance de cette politique : les hausses seront supportées par les classes moyennes qui n'auront pas les moyens de changer leur mode de vie et qui vivront cela comme une nouvelle injustice. Par effet ricochet, cette politique va créer une tension énorme autour du seuil entre les populations défavorisés qui vont bénéficier d'une baisse de leur tarif énergétique (et donc qui seront loin de la sobriété!) et les classes moyennes qui vont en être victime. Il faudra mieux être sous le seuil qu'immédiatement au-dessus!

 

Cette proposition souffre donc du même défaut que la taxe carbone : elle sera très impopulaire. Dès lors, dans nos sociétés démocratiques, il est probable que le politique n'osera pas prendre ce risque. 

 

Autre désaccord: le rapport propose le développement et la généralisation d'une contribution au service public de l'énergie qui remplacerait la CSPE  actuelle réservée à l'électricité. Cela permettrait de financer les investissements nécessaires. C'est une bonne chose de rentrer dans cette logique de contributions incitatives, mais une CSPE généralisée deviendrait un enjeu financier énorme pour les grands groupes. On peut leur faire confiance pour organiser, par le lobbying, la captation de cette manne au profit de leur propre développement. Le risque est donc grand de voir une taxation des ménages profiter à des grands entreprises. Même si cela est fait pour "la bonne cause énergétique", est-ce une politique efficace socialement? Il est permis d'en douter.

 

Enfin dernier point : sur les mobilités, le rapport insiste essentiellement sur le développement des véhicules à très basse consommation (en-dessous de 2 litres). C'est là encore une bonne chose, mais une vision parcellaire de nos problèmes de mobilité. Continuer à penser que la voiture individuelle restera la principale solution à nos problèmes de transport est un non-sens à l'échelle des 30 ans à venir. Le développement de la mobilité 2.0 doit amener à sortir de ce schéma qui n'est pas tenable à long terme car on ne peut envisager une planète avec plusieurs milliards de voitures individuelles. La voiture basse consommation doit être vu  comme une solution de transition ... à condition d'envisager et de préparer le financement de la suite.

 

Conclusion: ce rapport représente un vrai progrès par rapport aux anciennes approches de cette question essentiellement parce qu'il voit la taxation environnementale, sous différentes formes, comme le seul moyen de financer la transition énergétique. Il s'agit d'une véritable innovation cruciale en cette période d'endettement généralisé. Mais les modalités d'actions choisies restent trop traditionnelles pour répondre aux enjeux qui nous attendent. La lecture du rapport est d'ailleurs, sur ce point, décevant par son classicisme par rapport à la synthèse. 

Dans un prochain article, nous proposerons d'autres démarches davantage innovantes pour permettre cette transition, des contre-propositions. Cette démarche a pour souci d'alimenter le débat sur cette question cruciale de la maîtrise de l'énergie. 

 

Deux interrogations pour finir :

-Finalement, le rapport ne fait-il pas la part trop belle aux grandes entreprises au détriment du consommateur et du citoyen?

-les deux tiers des membres du groupe de travail ayant rédigé le rapport se présentent sous un pseudonyme. Si cette démarche peut se comprendre pour un haut-fonctionnaire ou un cadre du privé, elle interroge pour un professeur d'université ou un ingénieur indépendant. Que cache cette (fausse) pudeur?

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21 août 2011 7 21 /08 /août /2011 08:32

 

grandjean.jpg

 

Il y a un an et demi, Sarkozy enterrait la taxe carbone. Aujourd'hui, il n'existe plus grand monde pour la défendre mais de plus en plus de responsables politiques et d'experts réclament une fiscalité verte, environnementale. Quel glissement s'est opéré dans leur réflexion? Comment évolue l'opinion sur ces questions? Travaillant depuis maintenant 5 ans sur la fiscalité environnementale, je peux analyser avec recul cette évolution.

 

Pourquoi la taxe carbone est enterrée dans l'opinion? Essentiellement, parce qu'elle était une taxe environnementale rudimentaire qui avait pour principal défaut de fonctionner sur le mode punitif : "je te sanctionne parce que tu pollues". Ce principe était très mal passé dans l'opinion qui acceptait mal qu'on demande aux ménages de payer pour un mode de vie qu'on leur a vendu depuis des décennies. J'ai écris de nombreux articles sur cette question, prévoyant dés 2007 son abandon (1).

Aussi aujourd'hui, certains veulent d'une taxe "verte" conçue comme une nouvelle vache à lait pour régler d'autres problèmes. Un exemple récent (le  18 août) se trouve dans une tribune du NouvelObs d'un candidat à l'élection présidentielle, François Hollande. Préoccupé par la crise de la dette, il cherche d'autres moyens de trouver de l'argent et il écrit : ..., il n'est plus possible d'alourdir le coût du travail quand notre balance commerciale est à ce point dégradée. C'est pourquoi je propose un basculement des cotisations patronales de la branche famille vers des prélèvements d'Etat (notamment par la fiscalité écologique).

Hollande fait la même erreur que de nombreux experts, il y a deux ou trois ans: croire que la fiscalité verte va régler nos problèmes de charges sociales. Dans un débat maintenant assez connu avec Jacques Weber, j'avais vigoureusement combattu ce choix préjudiciable à notre système de solidarité nationale qui n'apportait pas grand chose à la résolution de nos problèmes écologiques. Je note d'ailleurs que ma position semble avoir fait des émules puisque cette idée n'est plus guère défendue par les experts aujourd'hui; Hollande, comme de nombreux politiques, étant en retard d'une guerre sur ce point là.

L'évolution de la fiscalité environnementale, on la trouve aussi dans un rapport qui vient de sortir, écrit pour la fondation Terra Nova, par une commission présidée par Alain Grandjean.

Grandjean est l'auteur malheureux d'un manifeste intitulé "financer l'avenir sans creuser la dette" où il proposait de relancer l'emprunt pour financer la transition écologique. Seulement, ce texte, écrit en mars 2011, a vieilli très vite devant la crise des dettes souveraines.  Terra Nova lui a demandé un rapport sur la maîtrise de l'énergie, rapport bien davantage pertinent que le précédent. 

Grandjean a fait parti des défenseurs de la taxe carbone. Son évolution est intéressante car il propose maintenant d'utiliser la taxation du carbone pour financer des investissements "verts" de maîtrise des consommation (rénovation des bâtiments) et de développement des Renouvelables (2). Autrement dit, avec quelques années de retard, Grandjean se rallie aux propositions de contributions incitatives que je défend depuis 2007. C'est une bonne nouvelle pour la fiscalité environnementale !(3)

 

Tout doucement, l'opinion progresse sur cette question de fiscalité environnementale : on comprendra dans quelques années que cette fiscalité n'est pas une contrainte de plus mais le seul moyen de trouver l'argent nécessaire pour relancer l'économie. Devant le mur des dettes, il nous faut trouver de l'argent ailleurs pour sortir nos sociétés du carbone et du gaspillage des ressources, c'est la véritable nature des contributions environnementales : financer le changement de société.

 

 

 

 

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(1) En septembre 2007, j'écrivais un article qui expliquait pourquoi la taxe carbone n'allait jamais être appliquée: extraits:  la taxe carbone est une proposition environnementale remarquable puisqu'elle s'attaque à aux menaces pour notre avenir que constitue l'effet de serre et la fin du pétrole.
Elle consiste à sanctionner, de manière progressive les comportements générateurs de CO2.
Pourtant, il est probable qu'elle ne soit jamais appliquée, et cela pour trois raisons. La première tient à l'impopularité d'une nouvelle taxe. Quel gouvernement prendra ce risque politique? 
La seconde tient à la difficulté de fixer une assiette à ce type de taxe. Le taux de CO2 est un indicateur chimique difficilement conciliable avec les contingences fiscales ou administratives. Il sera donc difficile de créer des taxes proportionnelles à la consommation de carbone.
Mais la dernière raison est sans doute la plus embarrassante : la taxe carbone est progressive pour pousser les consommateurs à changer leurs habitudes de vie. Mais cette taxe sanctionne de mauvaises habitudes sans donner aux personnes les moyens de changer. A quoi cela sert-il de sanctionner celui qui utilise son véhicule automobile si le réseau de transports en commun n'est pas à la hauteur ? A quoi bon sanctionner la surconsommation énergétique de logements mal isolés dont les propriétaires n'ont pas les moyens de financer l'isolation thermique? Pourquoi pénaliser le transporteur routier si il n'existe pas de système de ferroutage assez conséquents pour encourager les chefs d'entreprises à l'utiliser?

 

(2)CREER UNE « CONTRIBUTION AU SERVICE PUBLIC DE LENERGIE » POUR ASSURER LA SOLIDARITE AVEC TOUTES LES PERSONNES EN SITUATION DE PRECARITE ENERGETIQUE, SOUTENIR LE DEVELOPPEMENT DES ENERGIES RENOUVELABLES ET ACCOMPAGNER LES EFFORTS DE MAITRISE DE LA DEMANDE EN ENERGIE 

 

La Contribution au service public de l’électricité est généralisée à l’ensemble des énergies et devient la au service public de l’énergie (CSPE). Elle devient ainsi une taxe chapeau regroupant plusieurs taxes existantes, à l’image de la TGAP dans le domaine de l’environnement. Cette contribution au service public de l’énergie est une taxe affectée au financement d’une nouvelle tarification de l’électricité (...) et d’une solidarité réelle avec les cinq millions de ménages les plus modestes dans leurs dépenses d’énergie et de carburant, au développement des énergies renouvelables, à la péréquation tarifaire entre les îles et la métropole et au soutien aux investissements dans la maîtrise de la demande en énergie.

 

(3) J'expliquerais dans un prochain article les faiblesses du plan que Grandjean propose à TerraNova.


 

 

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3 avril 2011 7 03 /04 /avril /2011 21:47

 

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Au moment du Grenelle de l'Environnement, un immense espoir était né : on allait enfin se donner les moyens d'une véritable politique écologique en France. Les entreprises, les politiques et les écologistes avaient trouver des terrains d'entente. Des mesures consensuelles étaient prêtes. Quatre ans après, le soufflet est largement retombé et la majorité des acteurs économiques et politiques semblent désabusés.

Pour comprendre ce qui s'est passé, on peut chercher des boucs émissaires, mais la vérité est plus simple et pragmatique : les méthodes choisies ont été mauvaises, particulièrement dans le domaine fiscal. Démonstration.


1-Les mauvais "réglages" de la fiscalité environnementale:

Premier exemple, les pompes à chaleur : Après le Grenelle, une série de mesures vont permettre de favoriser les économies d'énergies. Parmi celles-ci, prenons la mesure fiscale qui permet de développer les pompes à chaleur. Pour l'achat et l'installation de ce matériel, le contribuable bénéficie d'un crédit d'impôt. Celui-ci est dans un premier temps de 50%. 

Cette mesure montre toute l'efficacité des incitations fiscales : les ventes explosent, le secteur se porte très bien, les entreprises qui fabriquent, commercialisent et installent des pompes à chaleur se développent.

Mais à partir de 2009, le crédit d'impôt passe de 50% à 40% puis à 25% en 2010. L'annonce de cette diminution entraîne une explosion des ventes. Chacun voulant s'équiper avant la date fatidique du 1er janvier 2009.

Début 2009, le secteur voit ses ventes s'effondrer, le secteur ralentit, les réductions des emplois ne sont plus loin. L'effet d'aubaine est passé. Les entreprises qui ont investi devant les commandes se retrouvent avec des chaînes de montage, des stocks et du personnel inutiles : le temps est venu des plans sociaux...

Dans cet exemple, le crédit d'impôt montre aussi un autre de ses défauts. Les particuliers, qui s'équipent en pompe à chaleur, étaient souvent davantage motivés par la réduction d'impôts que par l'amélioration de l'efficacité énergétique de leur logement. Certains entrepreneurs, peu scrupuleux, n'hésitaient pas alors à majorer leur devis, sachant que plus la facture était importante, plus la réduction d'impôts l'était aussi.

L'effet pervers était en place: le crédit impôt étant important, le coût de cette avantage fiscal devient considérable pour l'Etat qui décide de baisser brutalement son taux. Le secteur alors s'effondre.

On a vu l'an dernier, le même phénomène se produire dans le photovoltaïque. Le prix garanti de rachat de l'électricité (6 fois le tarif normal) pendant 20 ans a permis une croissance exponentielle du secteur. Mais, à ce rythme, le coût pour le consommateur allait devenir énorme. Le gouvernement décide alors, après un moratoire de 3 mois, de diminuer ce prix de rachat. Le secteur subit une forte décélération. 

Le bonus-malus dans l'automobile a rencontré moins de problèmes. Mais contrairement à ce que pensaient ses concepteurs, le système ne s'est pas équilibré: les bonus ont toujours été plus élevés que les malus. La facture  pour l'Etat n'a fait que gonfler malgré plusieurs régulations. C'est bien la preuve que ces mesures fiscales sont d'une redoutable efficacité. Mais ces changements de bonus-malus démontrent que ces mesures fiscales nécessitent une démarche de régulation pertinente.

 

 2-Quelques principes de base pour réussir une fiscalité verte efficace:

Quelles conclusions faut-il tirer de ces expérimentations? 

Deux points positifs se dégagent :

-dans ces dispositifs, la contestation, traditionnelle en France par rapport à la fiscalité, s'est peu exprimée. Les démarches choisies étaient donc intéressantes parce qu'elles paraissaient légitimes à une majorité de contribuables.

-techniquement, l'installation de cette fiscalité ciblée ne semble pas poser de problèmes particuliers.

Par contre, ces démarches doivent s'améliorer, sur un certain nombre de points. La fiscalité environnementale est une démarche relativement neuve, dont les bons "réglages" ne sont pas encore au point.

Trois idées doivent retenir notre attention:

La bonne pratique en ce domaine consiste à installer une progression décennale connue à l'avance par les acteurs concernés: par exemple, 1 euro la tonne la première année, puis 1,5 euro la deuxième année. La démarche progressive permet, en commençant assez tôt, et faiblement, de ménager les particuliers ou entreprises concernés. Et le caractère inéluctable les oblige à anticiper et à s'adapter  à la nouvelle donne fiscale. Elle permet aussi l'anticipation des entreprises et facilite les décisions des différents acteurs qui vont pouvoir faire des choix "objectifs".

Mais, on l'a vu dans le cas du crédit d'impôt pompe à chaleur ou dans celui du bonus-malus automobile, si un dispositif fiscal est trop cher, le pouvoir politique sera tenté de le rogner et de ne pas respecter son engagement de progression décennale connue. Il faut donc inventer des dispositifs fiscaux conçus autour de l'équilibre des finances du système: il ne doit rien coûter à la collectivité. Pour cela, les dépenses étant prévisibles, il faut que l'utilisation de l'argent récolté soit en équilibre rigoureux avec les recettes. 

Les méthodes choisies doivent éviter la création "d'effets d'aubaine" pour les petits malins qui auraient la bonne idée de détourner le système incitatif ainsi conçu pour s'en mettre plein les poches et participer au gaspillage de l'argent public. Ainsi il faut éviter le crédit d'impot et ses effets pervers,  il semble préférable de privilégier la prime à l'investissement, à condition qu'elle soit correctement encadrée.

 En conclusion, il en est de la fiscalité environnementale comme du moteur à explosion, il a fallu aux inventeurs de nombreux réglages, ratages, des remises en questions et des pannes. Progressivement, les inventeurs ont su trouvé la bonne méthode pour faire fonctionner "comme une horloge" nos moteurs à explosion. Il faut faire la même chose en politique. La critique facile, manichéenne et simpliste que l'on trouve souvent sur internet est facile à formuler mais nos sociétés complexes réclament davantage de subtilités et de discernements.

(Merci à Bernard dont les informations sur le secteur de la pompe à chaleur m'ont permis d'écrire cet article)

Pour aller plus loin:

Trois principes de base pour une fiscalité environnementale efficace

La fiscalité environnementale doit contribuer à l'égalité républicaine

Il faut découpler la fiscalité environnementale du budget de l'Etat

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1 mars 2011 2 01 /03 /mars /2011 16:18

Quand on est l'auteur d'un blog  consacré à des questions aussi techniques que celle de la fiscalité environnementale (même si les implications sont clairement politiques), on est toujours heureux de rencontrer quelqu'un qui partage les mêmes préoccupations que soi. J'ai eu beaucoup de plaisir à échanger avec Pierre Borie, un expert comptable passionné par ces questions. Ces réflexions sont pertinentes et utiles, je voulais les faire partager aux lecteurs de ce blog.

 

Pierre Borie : Alors que l'on parle d'une importante réforme de notre code fiscal, il est urgent de s'aviser qu'une fiscalité environnementale est capable non seulement de répondre aux objectifs de clarification et de justice nécessaires, mais de satisfaire aux exigences du bon sens. "La maison brûle, et l'on ne fait rien !" ? Eh bien agissons, autrement qu'en affichant de bonnes intentions. Eugène Schueller prônait déjà, en 1956, un "impôt sur l'énergie". Tout le monde est aujourd'hui d'accord avec cela, à condition de ne pas être concerné. Les multiples taxes environnementales qui existent sont largement inefficaces (23ème rapport du conseil des Impôts, 2005). La taxation du carbone par le biais du système des quotas européens revient à vendre un droit de polluer. Cela n'a pas de sens. Tournons le dos à Coase, et suivons Pigou en taxant les pollutions sans pitié pour les pollueurs : c'est le seul moyen de les rendre vertueux, et de les faire s'organiser en générant moins d'externalités négatives pour la collectivité. Faisons notre "Eco-révolution" (CJD - 21/05/2010), changeons de paradigme économique pour faire de l'écologie politique (Corinne Lepage.

Ce n'est pas utopique : les ingénieurs et les comptables sont capables de dénombrer des quantités de polluants intégrés dans une chaîne de production. Que les pouvoirs publics en normalisent les méthodes de collecte et leur donnent un prix ; cela sera valorisé dans les comptes de résultat des entreprises, pour alourdir leurs coûts et servir de base à une taxation verte. La taxe verte peut frapper les équivalents-carbone, et tout ce que l'on voudra bien se donner la peine d'inventorier pour un réduire l'impact (déchets, métaux lourds, etc). Le poids de cette taxe sera tel qu'elle en viendra à remplacer petit à petit la TVA, pour ne pas peser sur les prix. Le consommateur final se tournera évidemment vers le producteur le mieux disant. Celui qui pollue trop devra s'adapter, ou sera balayé par les plus économes : c'est une dynamique vertueuse qui s'enclenche. Il y aura des sinistres, des laissés pour compte, mais pouvons-nous nous permettre de les laisser faire ? Dans toute révolution, il y a des victimes, mais la collectivité montre à chacun la voie du salut. Ceux qui préfèreront continuer à polluer depuis ailleurs, verront leurs produits pénalisés à l'entrée de notre marché. Cela nécessite, bien entendu, du courage politique, notamment vis à vis des lobbies, et une parfaite harmonisation au sein de l'UE. Mais les temps sont propices pour être entendus de nos partenaires.



Rendons-nous compte que ces bouleversements sont en même temps une formidable opportunité pour nos entreprises et notre jeunesse, qui y trouveront la source d'une croissance nouvelle et d'un fructueux engagement citoyen : c'est ce que l'on peut appeler du développement véritablement durable, et c'est donner du corps à ce concept de RSE que l'ONU nous demande d'intégrer depuis plus d'un demi siècle !

Il est heureux que nous puissions débattre publiquement de ces sujets par le biais de "blogs" comme celui-ci. Merci à son concepteur. Espérons qu'ils permettront de faire avancer les idées pour les rendre incontournables à nos édiles et à nos élus.

 

Rodrigue Coutouly: Tout à fait d'accord avec votre analyse.

Ce que je défends, en prolongeant le principe du pollueur payeur, consiste à y associer deux modes d'actions complémentaires :

-le produit payé par le pollueur doit être utilisé pou financer les investissements verts. Je ne crois donc pas à une taxe qui remplacerait les taxes existantes (TVA ou autre).

-le pollueur payeur est finement ciblé, comme l'investissement recherché. On entraîne donc une dynamique dans chaque branche et chaque territoire pollué.

 

Pierre Borie: Je partage vos objectifs. Dans mon esprit cependant, la taxe verte telle je la conçois aura vraisemblablement un tel effet dans les comptes des entreprises qu'elle génèrera un important surcoût qui ne pourra qu'aboutir à augmenter les prix de vente le long de la chaîne de production, facteur d'inflation. Au final, le consommateur ne pourra payer que si le taux de TVA est abaissé. Le produit de la taxe verte pourra bien entendu être utilisé par l'Etat dans le cadre de sa politique environnementale ou d'aménagement du territoire, mais le même résultat pourra être obtenu en amenant les entreprises à financer elles-mêmes les efforts à consentir pour diminuer leur empreinte écologique, simplement en jouant sur le prix de l'unité de pollution. Entre 15 €, 200 € (en Suède) et 700 € (ancien prix payé par EDF aux producteurs privés) la tonne de CO², il y a de la marge, où les pouvoirs publics peuvent se mouvoir de façon discrétionnaire (en concertation cependant avec nos voisins).

 

Rodrigue Coutouly: Nous avons cependant un point de divergences : vous estimez que la taxation écologique doit être forte pour être dissuasive. Je ne suis pas d'accord : dans ce cas, comme on l'a vu pour la taxe carbone, des forces se conjugueront pour empêcher sa mise en place.

C'est l'esprit du système démocratique qui veut cela. Je penche donc plutôt pour des taxes faibles, voir très faibles, mais dont le prix augmentera inexorablement. Ce qui sera incitatif, c'est l'utilisation de cet argent pour investir dans des démarches non-polluantes. 

Je veux donc renverser le paradigme habituel de la fiscalité verte qui veut que l'on va sanctionner le pollueur et que cela sera suffisant. 

 

Pierre Borie: Je comprends très bien vos craintes, et pense comme vous qu'il est préférable de ne pas jouer au "chamboule-tout" dans un pareil domaine. Mais il faut avoir du courage politique et dire haut et fort ce que l'on veut.

L'économiste Christian de Perthuis, partisan de la taxe carbone, reconnaît que "les groupes de pression vont se déchaîner", mais dit aussi préférer une taxe imparfaite à rien du tout. Rappelons-nous que le principe "pollueur-payeur" a été adopté par l'OCDE en 1972. C'est bien le pollueur qui doit payer, et pas la collectivité par le biais de l'impôt.

Je suis "pigouvien", parce que je sais que les chefs d'entreprise cherchent à fuir l'impôt, et qu'il leur faut avoir la baillonnette de l'Etat dans les reins pour avancer là où le veut l'intérêt général. Sans doute vaut-il mieux agir progressivement pour leur laisser le temps de s'adapter, ne serait-ce que parce que la France ne peut pas agir seule en la matière. Commençons par faire en sorte que la comptabilité de toutes les entreprises, de la plus grande à la plus petite, donne la mesure du poids de C0² mis en œuvre pendant l'exercice, selon des méthodes normalisées, et qu'elles soient obligées de publier l'information : ce sera bon pour leur communication, et cela permettra de simuler la taxe verte qui viendra se greffer tôt ou tard dessus, en concertation avec nos partenaires économiques et sous le contrôle des électeurs. Le résultat sera beaucoup plus efficace, et rapidement obtenu, qu'en faisant confiance aux "coasiens" en poste à Bruxelles, qui réinventent une usine à gaz avec le marché des quotas : ça ne marche pas, et l'on voit bien, en voulant instituer en parallèle une "taxe carbone", que cela revient pratiquement à faire payer 2 fois le consommateur final tant les modalités en sont floues et arbitraires.

Par ailleurs, je ne fais pas confiance à l'Etat pour décider de ce vers quoi il faut investir le produit de la taxe verte : les risques de dérive, de détournement, sont trop grands. Selon moi, il doit donner les objectifs, et laisser les entrepreneurs choisir le meilleur moyen de réduire leur empreinte écologique.

 

Rodrigue Coutouly: "pigouvien" "coasiens", est-on obligé de choisir entre ces deux alternatives? Les modèles économiques de ces auteurs ne sont que des modèles construits à une époque qui n'était pas la nôtre. 

Je suis d'accord avec vous : appliquer le marché des quotas est un marché de ... dupes!

Mais je ne crois pas à la taxe carbone non plus : elle a déjà montré son inefficacité en n'étant pas mise en place en France. Et ses ancêtres scandinaves ont été installé dans un autre contexte culturel, dans une autre époque et sont davantage comparables à notre TIPP.

ll faut innover et, pour cela, il faut laisser les acteurs économiques agir en toute liberté, tout en permettant aux Etats et aux pouvoirs publics de retrouver du pouvoir sur les choix écologiques : c'est l'esprit de mon système de contributions incitatives. Ne pas faire confiance aux Etats, mais alors quel pouvoir pourra réguler le système?  

 

Pierre Borie: Je ne crois pas que nous ne soyons pas d'accord sur la manière. Dans mon esprit, il ne s'agit pas de taxer plus lourdement les entreprises et les particuliers -déjà trop largement sollicités dans notre pays-, mais de créer un impôt qui se substitue à d'autres, +/- progressivement, comme la TVA (partiellement) et les autres taxes environnementales (TIPP...),dont le Conseil National des Impôts lui-même dit la relative inefficacité ; un impôt qui ait une signification pédagogique pour inciter les agents économiques à agir dans le sens de l'intérêt général pour y échapper, plutôt qu'en fraudant. Un tel impôt aurait certes vocation à voir son rendement diminuer à l'aune de son efficacité, mais en agissant sur le taux (le prix de la tonne de CO², par exemple), on ne réduirait pas sa contribution au budget de l'Etat.

Une taxe verte ainsi conçue, basée sur la pollution suscitée par la consommation (gaz à effets de serre, déchets, produits toxiques, etc..., elle même quantifiée et valorisée par les marchands de biens et de services dans leurs déclarations de résultats annuels, frapperait le consommateur final dans la mesure où les entreprises seraient obligées de la répercuter dans leur prix de vente. D'où la nécessité de réduire le taux de TVA pour ne pas créer de l'inflation. Une telle taxe verte remplacerait la "TVA sociale" que l'on voudrait instituer pour pénaliser les importations non assujetties aux mêmes coûts sociaux que chez nous. Bien entendu, la France ne peut pas agir seule en ce domaine : il faudrait au minimum repousser les frontières à celles de l'UE. Mais les circonstances actuelles, la prise de conscience planétaire, me font penser que le moment est propice pour parvenir à un consensus avec tous nos principaux partenaires du monde occidental. Cela pourrait se traduire par une hausse très significative du coût du transport, et donc enrayer le processus de désindustrialisation chez nous, mortel pour notre société. Je ne vois pas comment changer de paradigme économique autrement qu'en passant par là. Cela suppose évidemment du courage politique, mais plus nous le déciderons tôt, plus la transition pourra se faire en souplesse, progressivement.

Rodrigue Coutouly: Je suis d'accord avec vous d'une manière générale, sauf sur un point.

Celui de l'échelle pertinente pour travailler. La majorité des personnes pensent comme vous qu'il faut atteindre une échelle suffisamment conséquente pour que cela soit possible. Et en général, cette échelle donnée est celle de l'Europe.

Je pense que cette idée est un vrai frein car attendre un consensus au niveau européen, c'est retarder des politiques concrètes de plusieurs années, voir de plusieurs décennies !

J'estime préférable d'agir au niveau national ou régional sur des politiques ciblées, sur des niches, au niveau de communautés d'intérêts, parfaitement repérés. Par effet tâche d'huile, ces politiques se diffuseront ensuite car elles démontreront leur pertinence. C'est l'idée que je développe dans l'article http://www.fiscalite-environnementale.net/article-la-fiscalite-environnementale-doit-elle-avoir-une-dimension-internationale-53397052.html

 

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20 février 2011 7 20 /02 /février /2011 12:33

 

 

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Répondant à mon article consacré à Comment sortir du tout-jetable? , un lecteur régulier me fait ce commentaire :  Pourquoi cette obsession de toujours vouloir régler un problème avec une taxe ? Cette "obsession" mérite d'être expliquée. Il y a en effet deux motifs possibles pour comprendre pourquoi un type consacre un blog entier à la fiscalité, soit il est fou et "obsédé", soit il y a des motivations plus nobles qui méritent d'être détaillées. Bien entendu, je suis pour la deuxième explication !

 

Les préoccupations environnementales irriguent de plus en plus la société. Peu à peu la prise de conscience se fait, mais les  dangers à venir ont tellement de conséquences sur nos modes de vie que les modifications semblent insurmontables. Réduire notre empreinte écologique, notre dégagement de carbone n'est-ce pas réduire notre train de vie? L'écologie semble avoir un coût infranchissable dans notre monde soumis à la concurrence.

Seul le monde de l'entreprise semble s'être emparé à bras le corps de cette question, tout du moins pour certains chefs d'entreprises novateurs. Pourquoi eux? Pourquoi le monde politique, et celui des experts, semblent moins réceptifs? Sans doute parce que le patron maîtrise l'univers de son entreprise qu'il peut construire à la mesure de ses convictions et aussi parce qu'il doit faire preuve d'anticipation pour réussir. 

C'est différent pour l'expert, ou pour le personnel politique, qui doivent gérer les tensions contradictoires de nos sociétés de plus en plus complexes. C''est une évidence : les partis politiques semblent de plus en plus impuissants à agir pour transformer la société.

On peut prendre quelques exemples récents dans l'actualité française : un ministre de l'éducation affirme qu'il va demander aux instituteurs de rendre  le calcul mental quotidien obligatoire en classe. Tous les anciens écoliers que nous sommes, de quelques générations que l'on soit, tous les parents d'élèves, le savent pourtant : le calcul mental régulier a toujours été , et est toujours, pratiqué dans les classes. Cette affirmation semble donc une gesticulation de plus qui permet de montrer que l'on a le pouvoir d'agir sur la réalité. 

On pourrait dire la même chose des lois récurrentes sur la récidive criminelle. On pourrait continuer l'inventaire des affirmations de ce gouvernement, et de tous ceux qui l'ont précédé, prouvant que la gesticulation a remplacé l'action réelle. Et c'est probablement parce que le pouvoir politique d'Etat est de plus en plus impuissant qu'il compense cet état par une politique frénétique d'effet d'annonce.

Car, finalement, de quel pouvoir réel dispose l'Etat et ses "pilotes" que sont les ministres? 

-l'action concrète des agents d'Etat, imposé par le ministre, est devenue de plus en plus difficile: les instituteurs font du calcul mental parce que c'est utile et non parce qu'on leur impose de le faire!  La prise d'autonomie des acteurs de terrain est une heureuse nouvelle : un ministre ne peut plus donner un ordre précis à ses fonctionnaires comme au bon vieux temps de Napoléon ou de Ben Ali en Tunisie. Et c'est heureux !

-l'action réglementaire montre chaque jour son impuissance, et particulièrement dans le domaine environnemental. A quoi servent donc les lobby ? A contrer les réglementations qui limiteraient le profit. C'est le combat du pot de terre contre le pot de fer. Il se conjuge avec la globalisation économique : vous êtes trop tâtillon? Nous allons voir ailleurs!

-bien entendu, la puissance publique peut pratiquer la sensiblisation et l'éducation du public; mais cela a un coût et montre ses limites face à la puissance de la publicité: que vaut le slogan "manger 5 fruits par jour" face à la force de frappe de l'industrie de la malbouffe? Le greenwashing amplifie le phénomène en brouillant les pistes.

-l'Etat peut investir dans des grands travaux particulièrement dans le domaine écologique. Mais un nouveau "New Deal" est impossible. Les finances des Etats modernes sont lourdement handicapées par leur endettement dans un système monétarisé mondial qui interdit de faire marcher la planche à billet.

-l'outil fiscal classique subit les pressions de divers groupes qui veulent limiter leur imposition. 

La mondialisation et le développement de l'individualisation, de la prise d'initiative, de l'esprit de liberté limitent fortement le pouvoir d'action des Etats et, par conséquent, du personnel politique.

Si celui-ci veut sortir de la gesticulation médiatique et retrouver le moyen de peser sur le réel, il doit se montrer inventif et créer de nouveaux outils pour agir. De quelle manière le peut-il? Les réglementations et les lois seront détournées. La sphère médiatique et publique  contient de nombreux autres acteurs devenus aussi ou plus puissants que l'Etat. L'outil monétaire ne lui appartient plus.

Finalement, le seul domaine où l'Etat garde presque toutes ses prérogatives reste celui de la fiscalité. Malheureusement, le système de taxation actuel met en concurrence les individus et les entreprises qui cherchent à diminuer la pression fiscale, au bénéfice de ceux qui peuvent faire pression, c'est à dire les plus puissants.

Il faut donc le faire évoluer, en inventer un autre, plus juste, plus efficace, qui permette au pouvoir politique de pouvoir agir sur le réel, retrouver des marges de manoeuvre. Ce système fiscal nouveau est en gestation sur ce site et ailleurs.

En effet, cette nouvelle importance apportée à l'outil fiscal se développe. De François Hollande a la révolution fiscale de Piketty/Saez/Landais, une partie de la gauche s'est emparée de la question, cherchant des outils novateurs pour agir. 

L'écologisme politique, depuis la défunte taxe carbone, semble en mal d'idées et de réflexion sur la question. C'est pourquoi mon "obsession" est là : parce que les initiatives individuelles ne suffiront pas, il faudra de l'action politique. Et la fiscalité à un rôle important à jouer dans cette évolution.

Pour ma part, je propose depuis quatre ans, le système des contributions incitatives, sans beaucoup de succès pour l'instant. Est-ce par que mes idées sont inapplicables ou est-ce parce qu'elles sont trop en avance sur leur temps? Je ne sais.

 

 


 

 

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15 janvier 2011 6 15 /01 /janvier /2011 07:44

 

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Au sein des médias et des laboratoires d'idées, des groupes de pression et des partis politiques, le débat le plus courant et le plus convenu porte sur la fiscalité. Ce sujet  fait le bonheur de diverses officines qui ont su en faire un argument commercial pour vendre des quantités de choses censées nous faire économiser ces vilains impôts.

 

Résumons les termes du débat :

Les anti-impôts décrivent l'Etat comme le vilain Moloch, dévorant, insatiable, ses enfants, dans une logique incompréhensible, l'argent se perdant dans un Etat-monstre gigantesque.

Les pro-impôts, moins audible en notre époque consumériste et individualiste, défendent, au contraire, l'idée que les impôts permettent de faire vivre le collectif, de promouvoir la solidarité envers les plus pauvres et les plus faibles.

Le résultat de ce débat, nous le connaissons aujourd'hui, partout dans les pays démocratiques. Devant les pressions électorales et les impératifs concurrenciels de la globalisation, les gouvernements ont progressivement réduits l'impôt sur le revenu et limités les autres taxes.  Dans le même temps, répondant aux besoins de service croissants des populations, s'adaptant à des sociétés de plus en plus complexes, les Etats ont augmenté leurs dépenses.

Ces décisions contradictoires entraînent des tensions de plus en plus importantes au sein des sociétés du monde entier. D'un côté, pour financer ce paradoxe, les Etats ont utilisé l'Emprunt, de l'autre, ils commencent à réduire leurs dépenses. Les citoyens doivent donc payer de plus en plus alors que les services répondant à leurs besoins sont réduits.

 

Comment alors tenter de sortir de cette situation? Ou plutôt quels correctifs et aménagements peut-on imaginer pour permettre à nos sociétés de continuer à fonctionner à l'avenir?

Certes, il faut continuer à gérer de manière responsable l'existant en assumant sa complexité mais il faut surtout innover et inventer de nouveaux mécanismes qui permettent de sortir des contradictions des systèmes fiscaux inventés au XXéme siècle.  Le principal d'entre eux, utilisé de manière récurrente par les anti-impôts, se situe dans l'image du Moloch que j'utilisais plus haut : c'est l'écart, la distance qui sépare le prélèvement, la taxation, et l'utilisation concrète, la dépense au profit de la société de cet argent.

Cette distance a trois conséquences néfastes :

-elle entraîne une incompréhension: le citoyen taxé ne comprend pas pourquoi et à quoi sert l'argent qu'on lui a pris.

-elle entraîne des injustices : utilisant cet écart, certains groupes se mobilisent pour payer moins d'impôts, la lutte des classes trouve là une traduction concrète, qui profite en général aux plus puissants.

-elle ne permet pas les régulations. L'inertie du système génère des lenteurs et une paralysie qui entrave la réactivité. Ce phénomène est à l'origine des dettes.

 

Sans vouloir supprimer un système qui a fait ses preuves, je propose donc de le compléter par un autre système fiscal plus réactif et qui remettra "de l'huile dans les rouages". Ce système est celui des contributions incitatives, que j'ai inventé, en réaction à l'idée de taxe carbone, qui me semblait concrétiser tous les défauts décrits plus haut.

Une contribution incitative a trois caractéristiques principales :

-elle est étroitement délimitée à un objet précis et s'applique à un groupe particulier (notion de communauté d'intérêts) qui finance mais aussi profite intégralement de la recette de cette contribution.

-elle est très faible mais son augmentation est prévue et connue

-le prélèvement de l'année N est redistribué intégralement l'année N+1, il n'y a donc pas de dettes. L'assiette de l'impôt étant connu à l'avance, c'est l'assiette de la redistribution qui varie.

Ce mécanisme a trois avantages :

-il permet à la puissance publique d'agir en taxant les comportements dommageables tout en ne les supprimant pas car on sait, dans nos sociétés ouvertes, qu'il est de plus en plus difficile de contraindre et d'interdire radicalement.

-il facilite, au contraire, l'épanouissement des comportements vertueux, qui seront récompensés. En quelque sorte, il met chaque acteur devant ses responsabilités.

-il contribue au financement public, car la redistribution se fera uniquement au profit de dépenses d'investissement.

Bien entendu, il faudra doter ces contributions de mécanismes  gommant les inégalités de revenus entre les contributeurs et bénéficiaires.

 

En conclusion, je voudrais insister sur quelques points :

Dans nos sociétés de plus en plus complexes, il faut envisager des mécanismes de régulation plus subtils que ceux du siècle précédent, les contributions incitatives en font partie.

Il ne faut pas mésestimer  nos contemporains: Penser globalement le monde, agir localement. La grande majorité des humains de cette Terre sont instruits et responsables. Il faut juste leur donner les outils pour agir efficacement et justement. Il faut éviter les situations qui les déresponsabilisent et facilitent la dissimulation, le mensonge et les détournements d'argent et de sens !

 

Pour aller plus loin:

La France meurt à cause des taxes (petite histoire polie)

Grenelle de la fiscalité : quelle place pour l'environnement?

Faire évoluer le bonus-malus

 


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3 novembre 2010 3 03 /11 /novembre /2010 07:29

 

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Premier ministrable, Jean-Louis Borloo vient de proposer un Grenelle de la fiscalité. Ministre de l'Environnement, on peut penser qu'il souhaite, dans ce cadre, y intégrer une réforme de la fiscalité sur l'environnement Sans s'intéresser à la pertinence de cette idée, on peut s'interroger, sur fiscalité environnementale, sur la manière dont cette réforme se ferait.

 

Première solution défendue par de nombreux experts proches de Nicolas Hulot: une fiscalité "verte" payée par l'économie carbonée dont les produits serviraient à faire baisser le coût du travail en participant au financement de la sécurité sociale, des retraites, de l'assurance maladie.

Deuxième solution que je défend depuis longtemps : une fiscalité "verte" dont les produits sont intégralement utilisés pour investir dans l'économie décarbonée, au profit de ceux qui ont payés ces taxes.

 

C'est une question cruciale dans le cadre d'un Grenelle de la fiscalité. Voulons-nous d'une réforme qui mette dans un pot commun les ressources fiscales? Ou préférons-nous plutôt une réforme qui sépare et compartimente ressources et utilisation des produits fiscaux?

Dans le premier cas, on fait rester la fiscalité environnementale dans la "grande lessiveuse des taxes" sans aucune lisibilité pour  les citoyens. Dans le second cas, on utilise des ressources fiscales précises pour lutter contre des  problèmes précis.

 

Illustration: 

Pour ma maison chauffée au gaz, je paie, chaque mois, 180 euros de consommation dont 130 euros de gaz.

Les perspectives sont sombres car ce prix du gaz ne peut qu'augmenter fortement dans les années à venir.  Et je ne dispose pas des ressources nécessaires pour investir dans un autre système de chauffage.

Première solution : une fiscalité "verte" du type taxe carbone est mise en place. Elle sert à alimenter les fonds permettant de financer les retraites, le chômage et la sécurité sociale. Le coût du travail va donc baisser, les chefs d'entreprise espèrent gagner en compétitivité. Mais le citoyen se pose des questions : il va donc payer plus de taxes, sans voir d'effets sur sa vie quotidienne sauf à espérer voir baisser le chômage. Il ne voit rien de concret se mettre immédiatement en place, s'inquiète de cette nouvelle remise en cause du contrat social en place depuis 1945 (avec les désordres et les résistances qui vont avec). Quant à moi, je garde ma chaudière gaz et je continue à payer de plus en plus à la fois l'augmentation des taxes et du prix d'un gaz devenu de plus en plus cher.

Première solution bis: ce qui était prévu avec la taxe carbone. On rend un chèque vert aux ménages pour compenser son coût. Les gens vont râler contre cette nouvelle taxe. Par contre, cela favorisera, pour les nouvelles constructions, des chauffages décarbonés. Mais moi, avec ma chaudière et mon chèque "vert" de 150 euros, je continue à payer mon gaz sans autre espoir.

Deuxième solution: la fiscalité environnementale se met en place  mais l'argent récolté est réinvesti dans l'investissement vert (contribution incitative). Ce réinvestissement se fait par catégorie de contributeurs et d'objectifs. L'ensemble des ménages possesseurs de chaudières au gaz paie une taxe sur le gaz, produit carboné. Mais cet ensemble bénéfice de cet argent pour faire évoluer ses moyens de chauffage.

Imaginons que cette taxe soit de 20%. Pour moi, cela veut dire une augmentation de 35 euros par mois. Je vais pouvoir bénéficier directement de cet argent, puisque, en fonction de mes revenus, l'Etat me subventionnera fortement pour que je fasse évoluer mon chauffage au gaz. Je pourrais alors imaginer le système qui va me permettre d'échapper à ma dépendance au gaz. Et, en relançant l'économie du bâtiment et de l'énergie, ce système fiscal va permettre de diminuer le chômage et de participer aux efforts pour financer notre système de protection social. 

On atteint donc les objectifs qu'espèrent les partisans de la première solution mais avec moins de dégâts et davantage de confiance.

 

Conclusion : Jean-Louis Borloo a raison sur un point : dans l'histoire de notre Nation, le problème fiscal est crucial. N'oublions pas que ce fut l'étincelle à l'origine de 1789. Laisser décider quelques technocrates et députés nous entraîne vers une impasse de plus.

Il faut donc réfléchir à un nouveau contrat social. Mais détricoter l'ancien, qui a assez bien marché mais n'est plus adapté, est-il la seule et la bonne solution? Ne faut-il pas, plutôt,  rajouter des articles au contrat social, des articles qui prendraient en compte d'abord la problématique environnementale devenue si importante aujourd'hui.

 

Pour en savoir plus:

La taxation écologique doit-elle se substituer aux taxes sur le travail?

 

La fiscalité verte, un outil politique au service de la liberté et de l'efficacité économique


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25 octobre 2010 1 25 /10 /octobre /2010 18:43

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Quand on est l'auteur d'un  blog consacré à la fiscalité, blog qui défend son usage dans les politiques publiques, on s'expose à recevoir ce genre de commentaire :"bonjour ! je lis les avis des uns et des autres; mais lorsqu'on me parle encore de taxes nouvelles; je vois rouge...le monde en crève des taxes de tous types. quand l'essence est déjà taxée avec TVA sur les taxes ( pratiquement 80 % de taxes ) assez assez. les taxes ne sont pas moralisatrices, elles nous épuisent."

Comment répondre à ces fréquents messages? Peut-être en écrivant une petite histoire, l'histoire d'un pays qui ne s'appelerait plus France mais Notaxe, un pays "enfin" débarrassé de toutes ces affreuses taxes, un pays merveilleux donc ! Retrouvons notre héros, Jack dans une nouvelle aventure !

 

Jack est un technicien heureux, dans son pays merveilleux de NOTAXE, son salaire est de 5000 euros soit le double de son salaire si il vivait en France, car il touche son salaire en entier, brut sans prélèvement de pension civile et de CSG ! De plus, Jack ne paie pas d'impôts sur le revenu, c'est interdit dans NOTAXE. Il n'y a pas non plus de TVA, et les achats sont donc environ moins élevés de 20%!

Jack ne manque pas une occasion de comparer sa situation avec son cousin Denis, qui en France, a un petit salaire et paie des tas de taxes, le malheureux!

 

Jack va partir travailler. Depuis Nans-les-Pins, 40 kilomètres de routes. L'essence, sans TIPP et sans TVA, est moins chère, elle coûte 20 centimes le litres !

Dès que Jack prend la route, la puce de sa voiture décompte les kilomètres de route avalés. Sans impôts, les routes sont financés par des péages automatiques qui enregistrent tous les déplacements : aller chercher le pain au village coûte 50 centimes d'euros, descendre à Marseille pour le travail, revient à 8 euros aller-retour. 

Mais auparavant, il faut amener les enfants à l'école. Le directeur attend Jack à l'entrée de l'école : pour éviter les mauvais payeurs, il faut payer à chaque fois que l'enfant va à l'école. Pour ses deux enfants, Jack fait un chèque de 60 euros, c'est le prix pour la journée. Il passe ensuite à la pharmacie, acheter une boîte d'antibiotique, c'est 40 euros.

De retour à la maison, le camion de poubelle vient de passer. Il passe tous les jours, de façon régulière,  il n'y a jamais de grève ! Mais le camion est équipé d'une balance, coût de l'enlèvement : 20 centimes du kilo, et un forfait de 10 euros par pesage, jack garde donc ses poubelles toute la semaine pour faire des économies.

Jack est un peu inquiet. Sa fille s'est cassée le bras le mois dernier. Quatre jours d'hospitalisation à 4000 euros, il faut faire un nouveau prêt bancaire pour payer cet impondérable. 

Il a un autre sujet d'inquiétude. Il a été cambriolé. La police privée a pris sa déposition pour la modique somme forfaitaire de 100 euros. Il a maintenant le choix entre le dépôt de sa plainte sur le fichier national des affaires en cours (60 euros) ou l'enquête globale (400 euros), il ne pense même pas à l'enquête précise qui en coûte 3000 euros. Il doit aussi aider sa soeur dans le besoin, victime d'une agression, elle ne peux se payer un avocat, il va devoir l'aider. L'affaire doit passer au tribunal, le juge demande 1000 euros pour instruire l'affaire.

 

Jack, en Notaxe, est un homme heureux, il ne paie pas d'impôts comme son malheureux cousin Denis qui vit en France.


Pour lire d'autres histoires

 


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19 octobre 2010 2 19 /10 /octobre /2010 13:48

Re-publication d'un ancien article publié le 28 avril 2008.  Tous les principes schématiques des contributions incitatives sont déjà en place à partir d'une critique sans concession du bonus-malus automobile.

 

Bilan de la mise en place du bonus-malus dans la vente d’automobile neuve :

cette mesure n’a pas entraînée d’opposition lorsqu’elle a été créée. Son principe a plu à l’opinion. Elle s’est révélée facile et rapide à mettre en place. Fonctionnant sur le principe du « gagnant-gagnant », construite avec les professionnels du secteur, elle n’a pas été accompagnée d’opposition, sous la forme de lobbying, contrairement aux mesures réglementaires qui « interdisent ».

 

   

Les points négatifs : l’aspect le plus séduisant du dispositif était que les recettes devaient équilibrer les dépenses, la mesure ne devant rien coûter à l’Etat. Mais, au bout d’un an, le dispositif rencontre un double frein, fonctionnant de manière paradoxale. Il est en effet perçu comme une taxe (ce qu’il est effectivement, dans la mesure où les recettes sont intégrés au budget de l’Etat) alors qu’il coûte plus cher qu’il ne rapporte. Les critiques convergent, à la fois venant des opposants aux impôts et des partisans de la réduction de la dette de l’Etat. Or c’est cette caractéristique qui était attractive : échapper à la dialectique aide ayant un coût-taxation impopulaire. La disparition de l’enthousiasme pour cette mesure s’explique pour deux raisons : le mécanisme créé ne permettait pas la régulation du système, ce système n’était pas assez innovant pour crée une rupture, l’opinion a fini par retrouver des similitudes avec les anciens dispositifs (augmentation des impôts, accroissement de la dette).

 

Propositions d’évolution : A partir de cette analyse, envisageons des modifications qui permettent d’améliorer le système du bonus-malus. Le système, présenté ici, reprend la méthode des contributions incitatives en intégrant des innovations. Puisque le bonus-malus est perçu comme une taxe supplémentaire, il faut que l’argent récolté ne soit pas intégré au budget de l’Etat. . Je propose donc que, donnée (bonus) ou perçue (malus), la contribution n’ait plus aucun lien avec l’Etat, qu’elle soit gérée financièrement par un fond dont la seule tâche est de percevoir et de redistribuer l’argent. Ce fond est indépendant, géré, par exemple, par la caisse des dépôts. Puisque le bonus-malus est rigide dans son application et ne possède pas de mécanisme de régulation, il faut en créer. J’en propose deux : l’augmentation progressive du malus et la fixation annuelle du bonus.

-l’augmentation progressive du malus : fixée par la loi, sur une période de cinq ans, l’augmentation du malus est prévue, elle est connue à la fois des constructeurs de voitures et des acheteurs, ainsi, chacun fera ses choix en conséquence. Les malus augmentent graduellement selon une progression calculée et connue à l’avance. Ces malus, commencent de manière modeste mais finissent de manière conséquente. La communication sur la hausse prévisible des malus pousse les entreprises et les consommateurs à s’adapter.

-la fixation annuelle du bonus : chaque année, la distribution des bonus dépendra des recettes (malus) de l’année précédente, elle sera fixée au début de l’année de manière à permettre d’équilibrer les recettes et les dépenses. Plusieurs mécanismes, que je ne détaille pas ici, permettront d’atteindre cette stabilité. Le budget de l’Etat ne risque plus de devoir éponger le déséquilibre. L’argent perçu, revenant dans la poche des consommateurs de manière transparente, n’est plus considéré comme une taxation supplémentaire. Cette démarche aura deux avantages annexes, qui mériterait des explications complémentaires : elle sera créatrice de liquidités, et, elle pourra éventuellement participer à la réduction de la dette publique car le différentiel positif à la fin de l’année sera utilisé à cet effet. La démarche réclame des méthodes de pilotage qu’il faudrait développer par ailleurs. Mais je tiens à préciser ici comment on pourrait imaginer un redémarrage du bonus-malus automobile selon ce principe.

Début année 1, une loi-cadre fixe le fonctionnement du nouveau dispositif bonus-malus : caractéristique du malus avec prévision sur 5 ans des nouveaux taux croissants, création du fond et du comité de pilotage, etc…

Pendant l’année 1, seul le malus est appliqué (il n’y a plus de bonus). Cette année « blanche » va permettre au dispositif de redémarrer sur des bases saines. A la fin de l’année, il est fixé les taux du bonus pour l’année suivante. Chaque fin d’année, le taux de bonus est recalculé en fonction du succès du bonus pendant les derniers mois et en fonction des recette du fond.

Ce dispositif est-il réaliste ? Est-il réalisable ? Je n’en sais rien, je pense, par contre, qu’un débat sur celui-ci permettrait peut-être de trouver des solutions car si nous voulons trouver des solutions à nos problèmes environnementaux, il faudra inventer des politiques publiques adaptées aux graves enjeux que nous rencontrons.

Rodrigue Coutouly Ile des Embiez, samedi 3 octobre 2008

Complément à l’article de Septembre 2008,

Après le Grenelle de l’Environnement, aprés plusieurs années de mise en place du bonus-malus automobile, il faut évaluer ce dispositif si on veut continuer avec d’autres innovations fiscales et aller encore plus loin. Examinons les critiques qui lui sont faites :

Critique 1 : le bonus-malus est une taxe, et une taxe est, par définition impopulaire. Puisque le produit du malus est perçu comme une taxe, il faut trouver le moyen de supprimer cet effet. En devenant contribution incitative, le bonus-malus n’est plus perçu comme une taxe puisque l’Etat ne touche pas les malus.

Critique 2 : Le bonus-malus coûte cher à l’Etat. Cette critique est paradoxale en apparence avec la première. Mais ce paradoxe prouve ce qui ne fonctionne pas avec cette démarche : bonus ou malus, cela passe par les caisses de l’Etat. Avec les contributions incitatives, cette critique disparaît puisque le budget des contributions s’équilibre toujours.

Critique 3 : le bonus-malus est brutal dans son application : s’appliquant du jour au lendemain, il pénalise les uns, favorise d’autres, pousse certains à accélèrer des achats. Les contributions incitatives se mettant en place progressivement permettent aux industriels et aux consommateurs de s’adapter.

Critique 4 : Le bonus-malus peut se révèler obsolète assez rapidement ou peu adapté. Par exemple, pour l’automobile il était prévu que les bonus et malus s’équilibrent, il n’en est rien. La contribution incitative est pourvu d’un mécanisme de régulation qui permet en permanence d’ajuster celle-ci à l’évolution de la demande et des marchés.

Description: une contribution incitative diffère du bonus-malus par quatre caractéristiques correspondant à ces quatre critiques :

“critique 1-caractéristique 1” : Donnée (bonus) ou perçue (malus), la contribution n’a plus aucun lien avec l’Etat, elle est géré financièrement par un fond dont la seule tâche est de percevoir et de redistribuer l’argent.

“critique2-caractéristique 2 :” Bonus et malus doivent impérativement s’équilibrer. L’argent perçu l’année N est redistribué (presque) intégralement l’année N+1.

“critique3-caractéristique 3 :” Les malus augmentent progressivement selon une progression calculée et connue à l’avance. Commençant de manière modeste mais prévue pour être forte, cette communication sur les malus poussent les entreprises et les consommateurs à s’adapter.

“critique4-caractéristique 4 :” les bonus sont régulateurs du système, les taux sont fixés pour l’année en fonction des malus perçus l’année précédente et de simulations de consommations de manière à équilibrer le budget des fonds dédiés.


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