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Twitter : @Rcoutouly

Il faut demander plus à l'impôt

et moins aux contribuables

 

Alphonse Allais

 

Outil fiscal

Les contributions incitatives sont des micro-taxes payées sur les activités polluantes. L'argent récolté permet aux plus démunies d'investir dans les transitions écologiques et énergétiques. 

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Un résumé de la pensée de l'auteur sur la crise écologique 
19 janvier 2013 6 19 /01 /janvier /2013 08:23

ordures

 

Zoom sur un secteur économique méconnu mais qui possède un réel avenir : celui du recyclage. Comment favoriser son développement?

 

1-Les poubelles au  quotidien 

Une rue étroite à sens unique, un lundi matin tôt, à Marseille, je roule derrière un camion d'éboueurs. Il s'arrête devant une résidence d'une cinquantaine de logements. Il va y rester une petite dizaine de minutes. Les trois gros conteneurs sont plein à craquer. Des sacs poubelles recouvrent le sol. Il faut vider les conteneurs puis les re-remplir. Au milieu des sacs, on trouve une glacière en bon état en apparence, des emballages cartons, des déchets verts, des pièces métalliques, ... L'ensemble est impitoyablement broyé et mélangé dans le camion-benne. Un vrai gâchis !

 

Chaque Français produit plus de 500 kilogrammes de déchets par an. 30% sont recyclés, alors que les Allemands, les Néerlandais ou les Belges en recyclent plus de 60%!

Pour régler ce problème, le Grenelle de l'environnement a prévu une augmentation progressive de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), -une des plus faibles d'Europe-, et l'affectation de ces augmentations aux investissements nécessaires pour les filières de recyclage.

Mais cela va-t-il modifier les pratiques des Français? Vont-ils faire le lien entre l'augmentation de cet "impôt" et leurs propres pratiques? Il est permis d'en douter.

Pour ma part, il y a une dizaine d'années, je sortais mon sac poubelle de 30 litres tous les jours, sans me poser de questions. Aujourd'hui, j'en sors un par semaine ! Mais cela me demande du temps, de l'organisation et ... des convictions!

Il faut trier quotidiennement le verre, le papier, les emballages, les déchets verts, dans quatre boîtes différentes: il a fallu installer un lombricomposteur sur ma terrasse avec des vers qu'il faut nourrir régulièrement. Je vais, en moyenne, au conteneur de verre tous les quinze jours et à la déchetterie tous les mois.

2-La filière économique du recyclage:

Or, les enjeux du tri des déchets et du recyclage ne sont pas uniquement écologiques: il y a un paradoxe à jeter, par exemple, une vieille poêle dans sa poubelle alors que le vol de métaux se développe. Nos déchets ont, de plus en plus, une valeur économique indéniable.

Prenons, par exemple, la filière du recyclage des vêtements. Les Français achètent chaque année 700 000 tonnes de vêtements. Or, il y a seulement 160 000 tonnes de vêtements collectés par an, qui permettent de donner du travail à 4000 personnes, sans compter le développement de la réutilisation de ces vêtements recyclés, soit re-vendues en fripe, soit transformé (par exemple en isolant pour le bâtiment).

La filière de la récupération des métaux représente 15 000 salariés (contre 40 000 en Allemagne). L'ensemble de la filière occupe plus de 35 000.

La réutilisation sur place des matériaux récupérés à d'autres avantages économiques.

Elle permet d'abord de lutter plus efficacement contre les délocalisations puisque la matière première se trouve sur place. Les pouvoirs publics ont intérêt à favoriser l'installation de filières dans une même zone industrielle: l'entreprise de recyclage est couplé à l'usine qui réutilise les matériaux récupérés

Elle permet ensuite de limiter le déficit de la balance commerciale puisqu'on limite les achats de matières premières à l'étranger. La croissance à deux chiffres des pays émergents a entraîné une explosion de la demande et donc une hausse durable des prix.

Enfin, le secteur possède encore de nombreux gisements encore inexploités: les déchets agricoles, les déchets du bâtiment sont par exemple très peu exploités.

3-Vers des politiques publiques plus dynamiques

Les pouvoirs publics en France espèrent développer le secteur grâce à des législations de plus en plus contraignantes qui imposent progressivement le recyclage dans tous les secteurs de production. Ils espèrent aussi que l'augmentation de la TGAP va inciter  les particuliers à changer leurs habitudes.

Rien n'est moins sûr tant les habitudes culturelles et les pratiques quotidiennes d'une majorité de nos contemporains ne les poussent pas à diminuer leurs déchets. Ils trient encore peu. Les entreprises ont, de plus en plus, de contraintes et de coûts, les particuliers sont laissés libres de trier ou non leurs ordures.

Pour les responsabiliser, je propose une démarche qui accélèrera le processus de conversion au tri sélectif. Il s'agit de faire varier la TGAP en fonction du poids des poubelles non recyclables.

Cette démarche s'adresse aux particuliers, ou copropriétés volontaires. Ils s'abonnent alors à un système de pesage (par code barre) de leurs poubelles. Le système de pesage et de lecture des codes-barres est installé sur les camions, les codes-barres sont inscrits sur les poubelles des usagers volontaires.

A la fin de l'année, la TGAP et les taxes d'enlèvement des ordures ménagères sont calculées en fonction du poids global de ces ordures non triées. Les volontaires ont donc intérêt à multiplier les possibilités de recyclage de leurs ordures pour en diminuer le poids total.

La démarche des camions bennes équipés de systèmes de pesage et de code-barre a déjà été testé avec succès dans certaines communes de l'ouest de la France. Mais il s'agit de démarche systématique, sur des petites communes, dans un milieu rural. Cela n'est pas transposable aux grandes villes. Au contraire, la démarche volontaire permet d'installer progressivement les infrastructures, de tester la méthode, de former le personnel et de s'appuyer sur les usagers les plus convaincus pour faire avancer la démarche.

Lors d'un dîner en ville, vous discutez avec votre voisin: "comment vous payez encore 2000 euros par an pour enlever vos ordures? Nous n'en payons plus que 500 euros, je vous explique pourquoi ... "

 

La taxe sur les ordures, modulable selon le principe du  tri volontaire est une politique publique accélératrice. Elle permet de précipiter l'investissement d'une grande partie de la population qui rechigne à trier ses déchets. Elle va accroître de manière significative la quantité de déchets recyclés, potentiellement créateur de richesse.


 

 

 


 

 

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17 mars 2012 6 17 /03 /mars /2012 07:44

 

toilette-seche.jpg

 

Le forum mondial de l'Eau se déroule à Marseille du 12 au 17 mars. Il a pour titre "le temps des solutions" et se focalise naturellement sur l'accès à l'eau potable. On oublie trop souvent de parler de la gestion des eaux usées, l'autre version du droit à l'accés à l'eau. 

 

Or, en ce domaine, la seule solution, qui soit envisagée, est celle de la gestion intégrée sous la forme de l'évacuation mélangée des eaux usées jusquà des stations de traitement de ces eaux. 

1-Un système d'assainissement hérité de l'Histoire:

Il nous semble en effet une évidence de diffuser sur la planète entière notre modèle de développement de l'assainissement, avec nos réseaux de conduite enterrés et nos stations d'épuration. Or ce modèle à une histoire et s'est mis en place dans un contexte historique précis.

Tout d'abord, le courant hygièniste, à la fin du XIXéme siècle et au début du XXéme siècle, s'est préoccupé essentiellement des éléments visibles de la propreté : vision et odeur des saletés accumulées dans les rues et les cours d'eau. Pour se débarrasser de la puanteur et des égouts à ciel ouvert, (et du choléra) on construit alors  dans les grandes villes les premiers réseaux d'assainissement.

Pendant longtemps, on s'est contenté d'éloigner le problème en poussant ces eaux dans les fleuves en aval ou dans les lacs et les mers. Cela fait à peine trente ans que l'on équipe ces réseaux de système d'épuration. On a en effet compris les dégâts que causaient à l'environnement le rejet brut de ces déchets liquides.

Le traitement des eaux usées, mélangeant les saletés de nos baignoires, de nos vaisselles, de nos selles et urines, est d'une grande complexité. Le principe de précaution impose des normes de plus en plus drastiques. Les infrastructures à construire sont énormes et coûteuses car, en bout de course, il faut séparer les différents composants toxiques pour les traiter un à un.

Il s'agit donc d'un marché particulièrment lucratif dans lequel se sont engouffrées des grandes entreprises, qui ont donc tout intérêt à voir ce modèle de dévelloppement se diffuser à la planète entière.

Courant hygièniste, principe de précaution, loi du marché se conjugent à nos habitudes de pays développé pour considérer ce système d'assainissement comme une évidence, un modèle qu'il faut imposer à la planète entière.


2-Les limites de nos systèmes d'assainissment:

Or, ce modèle est dans une triple impasse, dont il nous faudra sortir.

Impasse technique d'abord. Malgré l'amélioration des technologies utilisées, le traitement montre ses limites. On ne sait toujours pas quoi faire des boues usées qui accumulent les déchets les plus toxiques en bout de filière de traitement. On n'arrive pas à se débarrasser des molécules fines qui ont des conséquences sur l'environnement à la sortie des usines (voir par exemple, les conséquences du rejet des oestrogènes de nos pilules sur les populations de poissons). Les tentatives pour régler ces problèmes alourdissent considérablement les factures payées par l'usager.

Impasse financière ensuite. Dans de nombreuses régions du monde, la mise en place de ces réseaux, là où ils n'existent pas, a un coût faramineux. Nous bénéficions, pour notre part, de réseaux anciens, constamment entretenus, développés au fur et à mesure de notre urbanisation.

Dans les pays en cours de développement, la densification a été forte et rapide, sans construction de réseaux. Rattraper le retard et étendre ces réseaux n'est pas possible rapidement. A l'inégalité de l'accès à l'eau courante et potable, se rajoute donc une nouvelle inégalité, celle de l'accès à l'évacuation des eaux usées. Dans ces pays, les rivières, qui traversent les agglomérations, sont devenues des cloaques où aucune vie n'est possible.

Même dans les pays occidentaux, ce système atteint ses limites. La crise prolongée a tari les capacités d'investissement des pouvoirs publics alors que les exigences en matière sanitaire et environnementale ne cessent d'augmenter. La périurbanisation nécessite des infrastructures très étendues et donc très coûteuses.

Dernier problème, dernière impasse : sur l'ensemble de la planète,  la concurrence croissante entre les différents usages de l'eau, oppose l'eau nécessaire à l'évacuation aux eaux courantes domestiques et aux usages agricoles. Il faut en effet énormément d'eau pour évacuer nos déchets.

Il faut nous rendre à l'évidence : ce vieux système, inventé au XIXéme siècle n'est plus adapté à nos exigences du XXIéme siècle.

Or, un autre modèle émerge, moins compliqué, moins coûteux, mais hélas fortement méconnu: celui du traitement local et séparé des déchets.


3-Description d'un modèle alternatif:

Dès le départ, on a choisi de mélanger les différents déchets "liquides" pour s'en débarrasser. Or, ce mélange a des effets toxiques considérables dont nous ne sommes pas conscients. Par exemple, très peu de gens savent que la puanteur durable de nos selles et urines ne s'explique que par leur mélange. Séparés dès le départ, ces deux ingrédients perdent très rapidement leur odeur. 

Le mélange de toutes les molécules et constituants de nos eaux usés est la source du problème. Il faut donc séparer les selles, les urines et les autres eaux usées, en utilisant des toilettes sèches.

Séparées des selles et des urines, le traitement local du reste de l'eau sale est facilité. Les techniques de phytoépuration sont bien connues et maîtrisées. Quelques m2 de plantes par habitant  suffisent.  

Les selles sont transformés séparement par compostage ou lombricompostage. On peut, dans les grosses installations, récupérer le méthane dégagé. Les urines peuvent être épandues sur les terres agricoles (richesse en azote).

Il ne s'agit pas ici de défendre un modèle contre un autre. Mais plutôt d'envisager d'autres systèmes moins coûteux, plus facile à étendre et à développer.

Contrairement à l'assainissement classique (un réseau, beaucoup d'eau, une station de traitement à la fin du réseau), ces systèmes alternatifs peuvent en effet s'adapter avec souplesse à des situations variées: ils peuvent être organisés autour d'une maison individuelle, d'un lotissement, d'un quartier ou d'une commune.

Mais les avantages sont nombreux : très peu de rejets toxiques dans l'environnement, des déchets valorisés, la captation de gaz à effets de serre, des économies financières pour les collectivités et les particuliers, la consommation moindre d'eau et d'énergie, ...

 

4-Freins et leviers pour ces systèmes alternatifs:

Le principal frein provient de nos habitudes : nos water-closets font tellement partis de nos vies, depuis notre plus tendre enfance, que nous ne pouvons envisager leur disparition. Les toilettes séches semblent, pour la majorité de nos contemporains, des objets incongrus confondus bien souvent avec les toilettes au fond du jardin de nos grands-parents. Les représentations courantes les assimilent au passé et non au réel progrès qu'elles constituent puisqu'elles permettent la valorisation de nos selles et urines.

L'hygiènisme et son pendant contemporain, le principe de précaution, représente le deuxième frein: pour les autorités sanitaires, utiliser localement les déchets reste suspect. On craint les infiltrations dans les nappes phréatiques et autres spectres. On oublie simplement que c'est le mélange des déchets liquides et leur infiltration en aval qui constituent le principal danger. La séparation des selles et urines de l'eau usé règle définitivement le problème.

Enfin, le dernier frein, probablement le plus important, provient des multinationales qui ont investi le marché des eaux usées. Ils leur faudraient faire une douloureuse reconversion vers le marché, moins lucratif, de l'équipement des particuliers et collectivités en phytoépuration, en réseau localisé d'usage de l'eau, en composteur, etc...

Comment les pouvoirs publics peuvent aider à voir émerger ces systèmes alternatifs? En mettant en place une double politique.

1-L'instauration d'une contribution incitative sur les eaux usés, dont le produit servira exclusivement à financer les installations que certains particuliers et collectivités pionniers voudront réaliser.

2-le développement des filières d'utilisation des déchets utiles que vont créer ces systèmes alternatifs. Quand les selles, les urines et les eaux usées restantes auront un prix; quand certaines entreprises viendront l'acheter à l'usager, alors celui-ci y verra son intérêt.

Il faudra à terme que chaque acteur soit devant l'alternative suivante :

-soit je continue à me débarrasser de mes eaux usées mêlées, et j'accepte d'en payer le prix, chaque année, sous la forme de taxes d'assainissement de plus en plus coûteuses

-soit j'investi dans un système alternatif qui pourra me rapporter de l'argent à terme puisque mes déchets séparés ont de la valeur et que je peux les vendre.

 

Conclusion: le sixième forum mondial de l'eau était construit autour de la thématique des solutions. On peut regretter que celles-ci ont été envisagé essentiellement comme une reproduction de nos systèmes d'assainissement. On peut regretter aussi que le forum alternatif, qui se tenait en parallèle, se concentre essentiellement sur la thématique du marché de l'eau courante et oublie les problèmes d'assainissement.

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24 novembre 2010 3 24 /11 /novembre /2010 17:34

 

dechets.jpg

 

Dans le cadre de la semaine européenne de réduction des déchets, il n'est pas inutile sur ce site, consacré à la fiscalité environnementale, de se poser la question de l'utilité et de l'efficacité de la fiscalité pour aider à cette réduction.

 

Prévue dans le cadre du Grenelle de l'Environnement, le financement de l'enlèvement des ordures ménagères doit prévoir, dans la redevance payée par l'usager, une part incitative, en fonction du poids, du volume ou de la fréquence de ramassage. Voir le site de l'ADEME pour en savoir plus.

 

Les études sur l'efficacité de ce type de mesure sont positives. Cette démarche incite les usagers à diminuer de plus de 40% leur déchets même si certains comportements asociales se font jour au début (rejets sauvages ou brûlis). 

 

Réfléchissant sur une fiscalité environnementale de deuxième génération, je pense que l'on peux envisager quelques correctifs à ce système. Les voici.

 

Les contributions incitatives, que je défend ici, sont certes basées sur le principe bien connu du "pollueur payeur" mais j'y rajoute un autre principe celui du "pollueur payé pour dépolluer". En d'autres termes, cela veut dire que l'argent récolté est mis à la disposition du pollueur pour qu'il puisse sortir de l'ancien système dans lequel il s'est enfermé. Cet argent est donc utilisé comme fond d'investissement pour agir et transformer de manière positive. Et si cet transformation est réalisée par le pollueur qui devient acteur de sa propre mutation positive, on peux espérer une accélération de cette transformation.

 

Comment traduire ces principes dans le cadre de la réduction des déchets? Les détracteurs de cette réduction des déchets se plaignent souvent, et à juste titre, à la fois de se sentir culpabilisés et de ne pas avoir toujours la possibilité de trier et limiter leur déchets.

Ce que je propose:

-la contribution incitative payée sur la quantité de déchets est une part de la taxe ou redevance sur les ordures ménagères. Elle est faible au début et augmente d'année en année selon une progression connue.

-la première année, cette contribution sert à payer l'installation du nouveau système (équipement des bennes, information des usagers, etc...)

-les années suivantes, le produit de cette taxe est utilisé pour financer des équipements facilitant la réduction des déchets. Quelques exemples : fournitures pour un coût modique et symbolique d'équipements individuels (poubelles de tri, lombricomposteur d'appartement, composteur d'extérieur), d'équipement collectif (composteur de copropriété, bacs de tri variés et spécialisés).

-on peut envisager, ensuite, l'équipement en lieux publics (déchetterie, magasins, écoles et autres services publics) de bacs de ramassage de plus en plus spécialisés avec leur filière de ramassage. Puis l'aide aux industriels locaux pour investir en filières de recyclage, de réutilisation, de réparation. Développer une "économie de fonctionnalité" (Hulot, Bourg) qui développe les filières courtes et l'emploi local.

 

Voilà un exemple où la fiscalité participe à un processus positif ayant des impacts concrets à la fois dans le champ de l'environnement et dans celui de l'économie.

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